Soutien financier aux MAM : le témoignage de Naïma, assistante maternelle
Une Mam pour travailler en équipe
En 2014, j’ai décidé de monter un projet de Mam. J’étais seule, mais il y avait de la demande et j’avais envie de monter ce projet, de travailler en équipe. Si je connaissais le concept de la Mam, je n’avais pas pris la mesure de l’importance de s’associer avec des professionnels qui me ressemblent. J’idéalisais le travail en équipe, comme je l’avais connu en crèche, chacune aiderait l’autre et ça se passerait bien… J’ai passé une annonce pour recruter deux assistantes maternelles, et Pôle emploi m’a proposé des profils que j’ai reçus en entretien. Et si les entretiens se sont bien passés, notre collaboration s’est révélée bien plus compliquée que prévu : du point de vue du projet pédagogique, nous n’avions pas du tout la même vision des choses…
Un premier projet un peu bancal
Pour monter cette première Mam, j’ai été très bien accompagnée par la PMI. J’ai eu affaire à une seule interlocutrice unique, qui était à la fois en charge des agréments, des autorisations d’ouverture, des conseils pour l’aménagement des lieux etc. C’était très pratique et rassurant. Mais malgré mes demandes aux mairies, j’ai eu beaucoup de peine à trouver un local. Par chance, une personne a eu connaissance de mon courrier. Cette dame était propriétaire d’anciens bureaux de notaire dans un grand appartement qu’elle souhaitait louer. Touchée par mon projet, elle a rénové l’appartement à ses frais pour y ajouter une cuisine, une salle de bains et les quelques cloisons dont nous aurions besoin. La Mam a ouvert en 2016 mais travailler en équipe était délicat. On ne s’entendait vraiment pas, chacune dans notre coin à veiller sur « nos contrats », mes collègues ne voulaient pas faire d’activités et se contentaient de « garder » les enfants. Nous cherchions toutes à partir mais partir où et comment ? En 2019, le Covid est venu nous délivrer : lorsque les parents ont repris il y avait encore beaucoup de télétravail. Nous n’avions plus que 5 ou 6 enfants sur 12, et nous ne pouvions plus payer le loyer, alors nous avons fermé la Mam et je suis retournée travailler à la maison.
Un nouveau projet de Mam
Soulagée d’avoir quitté la Mam, j’ai vite retrouvé les travers du travail à la maison. La solitude, le manque d’interactions, de disponibilité… Et puis malgré notre mésentente, j’avais aimé travailler en Mam ! J’ai donc décidé de retenter l’expérience. Mais autant le premier projet de Mam m’avait semblé facile à concrétiser, autant ce second m’aura donné du fil à retordre… Pour cette seconde Mam, j’ai composé une équipe avec laquelle j’allais bien m’entendre. Deux assistantes maternelles nouvellement agréées que je connaissais et une troisième pour compléter l’équipe en cas de maladie ou pendant nos congés. A nouveau j’ai eu beaucoup de peine à trouver un local qui respecte les exigences de la PMI : de plain-pied, avec un seuil de marche plat… A sa demande, j’envoyais les photos de mes visites à la PMI qui me répondait invariablement, « Non Madame, il y a cela qui ne va pas… ». En 2023, après 6 mois de visites infructueuses, j’ai fini par trouver un local professionnel où tout restait à faire. Il n’y avait que les quatre murs, pas d’arrivée d’eau, pas d’arrivée d’électricité. Là, je pourrais répondre aux normes de la PMI ! Une fois le local validé par ma conseillère, j’ai rapidement signé avec le propriétaire et planifié les travaux.
Un refus difficile à comprendre
J’ai contracté un prêt auprès de ma banque qui m’a suivie, grâce à ma précédente expérience de Mam et j’ai engagé 58 000 € de travaux. La Caf du Haut-Rhin m’avait assurée qu’elle devrait pouvoir subventionner les travaux de mise aux normes de la Mam à 60% du montant investi, sur présentation des factures. Il suffisait de monter un dossier. Confiante, j’ai fait mes calculs, le projet ne devrait me coûter au final que 20 000 €, je me suis lancée. Le bail signé, les travaux avaient déjà commencé lorsque j’ai reçu un courrier de la Caf me signifiant qu’elle ne pouvait donner une suite favorable à ma demande de financement car la commune de Blotzheim ne figurait pas en zone prioritaire, c’est-à-dire en pénurie de places d’accueil. Je précise que sur cette commune de près de 5000 habitants, il n’y avait encore qu’une crèche de 32 berceaux et une micro-crèche de 12 places… et que de nombreux logements ont depuis été construits. Je suis tombée des nues.
De nombreuses aides mais aucune pour la Mam
Vous me direz qu’il existe d’autres aides prévues par la Caf. Le prêt à l’amélioration du lieu d’accueil (PALA) ? J’en avais déjà bénéficié pour pouvoir aménager mon logement lorsque je suis revenue travailler à la maison. Je n’ai donc pas pu en bénéficier à nouveau. Mais je ne trouve pas cela normal : à partir du moment où le prêt est remboursé, on devrait pouvoir en bénéficier pour un nouveau projet, quitte à solder le précédent… La prime d’installation ? Je l’avais déjà touchée en me réinstallant à domicile, après la fermeture de ma première Mam. Mes collègues en revanche ont pu en bénéficier. Enfin la prime de 6000€ octroyée aux ouvertures de Mam ? Je n’ai pas pu en bénéficier également car la commune de Blotzheim ne figure pas en zone prioritaire. Aujourd’hui je n’ai toujours pas compris comment la Caf fait ce calcul. J’ai eu beau contacter le service urbanisme de la mairie, la PMI, le RPE, afin de leur demander de l’aide, en vain. Et je n’ai plus aucun recours… Ma conseillère à la Caf n’a pu que m’expliquer que la Caf s’appuyait sur les statistiques pour définir les zones prioritaires qui pouvaient bénéficier de ces aides.
Des mensualités trop lourdes à assurer
Nous avons donc ouvert la Mam avec un gros prêt à rembourser sur 7 ans et des mensualités de pratiquement 800€. Avec mes collègues nous avions imaginé verser à la Mam un loyer de 300€ par mois, avec les indemnités des parents nous allions pouvoir nous en sortir correctement. Mais on se retrouve à devoir verser 700€ de loyer, avec les mensualités à payer, les charges… Et à la fin du mois, à peine plus que le Smic. En Mam, quel que soit le nombre d’enfants accueillis, le loyer et les charges mensualisées ne changent pas et il faut faire avec ! J’ai de nombreuses demandes et une liste d’attente mais de plus en plus de demandes pour des contrats de quelques jours par semaine, ou bien seulement des demi-journées. On ne peut pas non plus facturer davantage aux parents pour ne pas dépasser le plafond Pajemploi. Et en dessous de 30 heures par semaine, je sais que la Mam n’est pas rentable… Assistantes-maternelles en Mam, pourquoi ne sommes-nous pas mieux soutenues financièrement ?
La réponse de la Caf du Haut-Rhin
Au regard des obligations de confidentialité, la Caf du Haut-Rhin n’a pas pu réagir spécifiquement au dossier de Naïma. Toutefois, Virginie Vella, Chargée de conseil et développement Action sociale, Référente départementale Petite Enfance - Logement - Parentalité, nous indique « qu’au regard de la réglementation Nationale en vigueur en 2023 à savoir la Circulaire 2021 -009 du 7 juin 2021 sur le Plan d’investissement pour l’accueil du jeune enfant (Piaje), les projets de maisons d’assistantes maternelles, pour être éligibles à une aide à l’investissement, devaient notamment remplir des conditions d’implantation :
-le taux de couverture en offre d’accueil de la petite enfance devait être inférieur à 58% pour ouvrir droit au PIAJE
- et le potentiel financier par habitant devait être inférieur à 900€
Le taux de couverture petite enfance de la commune de Blotzheim était de 67% et le potentiel financier de la commune de Blotzheim était de 1683€, de ce fait les projets de MAM sur Blotzheim n’étaient pas éligibles à ces aides de la Caf. »
Et précise qu’en 2024, la réglementation en la matière a évolué.
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