"Un monde à moi" : Une Mam inclusive ouverte aux enfants en situation de handicap
« Nous ne faisons pas de différence »
En ce moment, à la Mam Un monde à moi, 12 enfants de 0 à 6 ans sont accueillis par le quatuor féminin. Parmi eux : Lissandre, 5 ans, atteint d’un retard de développement global. S’il est reconnaissable à sa chaise adaptée, pour le reste, rien, dans la manière dont il est accueilli ne le distingue des autres. Il joue dans le même espace, mange avec les autres et participe aux mêmes activités, aux mêmes sorties. Il va à l’école, une heure par jour. « En soi, nous ne faisons pas de différence : nous l’accueillons comme n’importe quel enfant, mais il a un truc en plus », confie-t-elle en clin d’oeil à la comédie « Un p’tit truc en plus » d’Artus, sortie au cinéma cette année. Pour Lissandre, le p’tit truc en plus, c’est donc sa chaise adaptée, fournie par les parents. Ce sont aussi les consultations avec des spécialistes qui peuvent avoir lieu sur place, dans une des chambres du rez-de-chaussée de la Mam. Ce sont aussi des conseils à la famille pour l’orienter vers les bonnes structures pour le suivi global de l’enfant.
Encore des places disponibles
En cinq ans d’existence, c’est le troisième enfant en situation de handicap qu’accueille la structure, après un enfant porteur de trisomie 21 et un autre, polyhandicapé. Pourtant, la Mam prévoit quatre places toute l’année pour eux et communique largement sur les réseaux sociaux sur ces places disponibles. Pour Jane Bliguet, c’est pourtant bien un manque de communication qui explique ces places vacantes. « Pour le moment, les enfants porteurs de handicap que nous accueillons ont été dirigés vers nous par le Relais Petite Enfance et sont arrivés grâce à notre site internet mais nous prévoyions de renforcer notre communication auprès des structures comme les centres d’action médico-sociale précoce (CAMPS) ou les centre médico-psycho-pédagogique (CMPP), entre autres, pour accueillir d’autres enfants. » Peu habitués à ce que les assistantes maternelles soient formées et en capacité d’accueillir, les parents d’enfants porteurs de handicap ne se tournent pas forcément d’eux-même vers ce mode de garde.
Une mixité bénéfique pour tous
Pourtant, cette Mam affiche un bilan plus que positif. « Nous n’avons pas envie d’arrêter! », assure Jane Bliguet. Ces cinq premières années leur ont permis de valider un postulat essentiel : l’accueil d’enfants porteurs et non porteurs en mixité s’avère bénéfique pour tous. « Pour les enfants en situation de handicap, beaucoup se joue les premières années donc être dans une Mam inclusive, ça les stimule et les tire vers le haut », résume Jane Bliguet. Et pour les autres, c’est une ouverture sur le handicap, la différence, même si, « il est encore un peu tôt pour constater les conséquences de cet accueil en mixité, estime Jane Bliguet. Ce qui est sûr, c’est que les enfants ne font pas de différence, ils prennent les autres tels qu’ils sont! » Des propos largement confortés par les récentes études sur le sujet. « L'inclusion est en soi une opportunité de stimulation, motivation et socialisation pour l'enfant, et donc de progrès », peut-on lire dans un rapport adopté par le Conseil de l'enfance du HCFEA le 5 juillet 2018. Pour ses rédacteurs, « l’inclusion (…) ne doit plus être une alternative, elle a vocation à devenir une évidence ». « Il faut, de toute urgence, développer des services de stimulation précoce pour les petits ayant une déficience intellectuelle », préconise un autre rapport, publié par le Comité régional des associations pour la déficience intellectuelle.
Un manque de soutien des pouvoirs publics
Malgré ce bilan positif, Jane Bliguet et ses collègues restent d’autant plus motivées à se mobiliser pour les enfants porteurs de handicap. Si elles ont pu offrir un répit aux familles et un accueil stimulant aux enfants, reste qu’une fois atteints leurs six ans, les aides (complément mode de garde) s’arrêtent et la suite du parcours de ces enfants et de leurs familles reste complexe. Les deux autres enfants accueillis à la Mam n’ont pas trouvé de place dans le public : l’un est en attente d’une place en institut d’éducation motrice (IEM) et l’autre est dans une école privée hors contrat…
Jane Bliguet regrette également ce manque de soutien de la part des pouvoirs publics dans la création de la MAM, qui a nécessité un aménagement pour les personnes à mobilité réduite (PMR) au rez-de-chaussée et celui du jardin comme outil pédagogique favorables aux enfants porteurs de handicap. Davantage de soutien pourrait pourtant contribuer à répondre aux besoins et au souhait des parents d’enfants porteurs de handicap. Alors que 15 % des parents d’enfants bénéficiaires de l’Allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) souhaiteraient placer leur enfant chez un assistant maternel, seuls 6 % le font, selon la dernière étude de la Drees sur le sujet, paru en décembre 2023. Au lieu de faire garder leurs enfants, ces parents s’en chargent eux-mêmes.
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