Propreté : les représentations d'aujourd'hui sont les idées d'hier

Il fut une époque où les bébés étaient mis sur le pot dès 10 mois. Puis les pratiques ont évolué et on a considéré qu’avant deux ans cela n’était pas souhaitable. Pour autant tout ce qui entoure cet apprentissage, la notion de sale, de propre n’a pas changé. Par Frédéric Groux, psychologue en crèche.
Des pratiques différentes selon les époques…et les connaissances
Les parents évoquent souvent des conseils contradictoires entre les crèches, pédiatres, familles, internet ou les magazines. Elles sont des mélanges de techniques de puériculture actuelles et des restes de pratiques de puériculture des générations précédentes. Ces dernières ont, en fonction des connaissances de l'époque, proposé un apprentissage « de la propreté » très tôt, autour des 9 à 10 mois. Jusqu'aux années 1970, les savoirs médicaux et psychologiques sont en développement et ont encore des lacunes sur le corps et la physiologie des bébés. Les couches jetables ne sont pas encore de bonne qualité et les prix sont élevés. Toutes les familles ne sont pas équipées de machine à laver le linge et les langes prennent beaucoup de temps dans la vie quotidienne. Les fratries sont aussi plus nombreuses. Pour toutes ses raisons, les parents, mais aussi les professionnels entourant les nourrissons, ont retiré les couches beaucoup plus tôt que les parents actuels qui eux suivent les conseils des nouvelles recommandations sur le développement du corps et du psychisme des jeunes enfants.

Les mots masquent les pensées
En France, on parle « d'acquisition de la propreté » ou « d'apprendre à être propre ». Les deux termes indiquent les pensées qui entourent ces apprentissages. Les notions de « sale » et de « propre » sont ancrées inconsciemment dans la pensée des adultes qui ont franchi cette étape. Les excréments sont affublés d'une image négative même avec les nouvelles connaissances sur l'importance d'en parler aux enfants. Dans l'histoire de l'Homme, les selles et l'urine ont provoqué des épidémies et sont des transporteurs de « microbes ». Cette peur reste dans l'inconscient des Hommes par une phrase d'alerte pour tout et n'importe quoi que le jeune enfant aurait envie de mettre à la bouche ou de toucher : « Ne touche pas, c'est caca ! ». Dans certaines familles et pour certains professionnels, le « mot caca » aura une connotation de « risque ou de danger » pour le jeune enfant qui aura entendu des centaines de fois cette phrase ou d'autres du même genre.

Une certaine pression des adultes
Soudain, à l'approche des deux ans et de l'entrée à l'école maternelle, le discours des adultes change pour devenir parfois une question obsédante : sera-t-il propre pour l'école ? Car comme « la légende parentale » le raconte : « un enfant avec une couche ne sera pas pris à l'école maternelle ». Nous sommes sur exigence de la société d'être « un bon parent » et « d'être un bon enfant ». La pression autour du sujet augmente avec les visites à l'école et la comparaison avec les petits camarades du même âge qui ont déjà abandonné « la couche ». On oublie de prévenir que la majorité des enfants passeront cette étape sans aide car dans le développement normal et sans trouble neurologique ou psychologique, tous les jeunes enfants iront aux toilettes sans difficulté. Les études ethnographiques montrent bien qu'à partir des deux ans dans beaucoup de cultures où les familles n'utilisent pas de couche, les enfants comprennent l’intérêt de trouver un endroit particulier pour déposer les matières fécales et les urines.

La longue histoire du bébé avec sa couche
Dans les pays occidentalisés, il y a de plus en plus une peur de « traumatiser » ou de créer un problème chez l'enfant. Il est devenu un « bien » précieux qu'il ne faut pas abimer. C'est parfois « la psychologisation » à outrance qui pénalisera les jeunes enfants. Il préférable de ne pas interpréter tous les signes à la place de l'autre mais de le regarder nous montrer ce qu'il sait faire et de s'adapter afin d'aller à son rythme. Les parents et les professionnels s'investissent dans cette période avec beaucoup d'énergie et, parfois avec déception, car leurs méthodes n'apportent pas les résultats attendus. De nombreux adultes, dans notre société de la culture de l'urgence et de la rapidité, pensent que le retrait des couches se fera en un jour et sans « accident ».

Les adultes oublient la longue histoire intime existante entre le bébé et sa couche. Une relation proposée par l’adulte dès les premières minutes de vie. Après l'accouchement et les premiers liens tissés entre ses parents et le nourrisson. Le nouveau-né sera lavé et il y aura la rencontre avec « sa couche » qui ne la quittera, pendant deux ans, 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. Une sensation constante sur son siège. Quand le bébé sort du ventre de sa mère, il découvre toutes les sensations de son corps qui sont physiologiques telles que la faim mais aussi celles de déféquer ou d'uriner. Or, les premières sensations seront une empreinte de la « normalité » pour lui... c'est comme ça que cela doit se passer. Lors des premières selles ou des urines, une sensation de chaleur accompagnera la miction et la défécation au contact de la peau du siège. L'association entre les deux sera un point important puisque en grandissant, c'est le refroidissement désagréable qui manifestera le besoin de changer la couche et non les selles ou l'urine dans la majorité des situations. Pour le nouveau-né, la couche fera partie de lui, d'une certaine façon, comme un prolongement de son corps, un contenant secondaire, une deuxième peau. Nous le définirons comme un complément du schéma corporel. Ce contenant est hors vision du nourrisson et les adultes mettent en place, lors du changement de couche, des techniques de puériculture pour ne pas « se salir », ne pas toucher le contenu et ne pas voire également la production de leurs chérubins.


Pour aller plus loin : Suivre notre formation en ligne sur le sujet : Accompagner l'enfant dans l'acquisition de la propreté

Accompagner toutes les sphères corporelles de l’enfant

Dès la naissance, nous pouvons aider les bébés à mieux se connaitre. Pourquoi faudrait-il attendre les 2 ans de l’enfant ? Si nous faisons une analogie caricaturale : « je lui parlerai quand il me parlera ». Les parents et professionnels ont compris l’intérêt du langage avant son apparition et que cela incite les bailleurs à parler. Il en est de même pour toutes les fonctions importantes de la petite enfance. L'adulte doit accompagner de façon bienveillante toute les sphères corporelles de l'enfant, il n'y en a pas de plus importantes que d'autres.

Article rédigé par : Frédéric Groux
Publié le 15 mars 2018
Mis à jour le 22 mars 2018

2 commentaires sur cet article

Bonjour, Enfin un article agréable à lire qui ne juge pas mais qui fait comprendre l'accompagnement à l'acquisition. Pour ma part même les professionnelles se moque de vous quand vous leur expliquer que vos propres enfants ont été propre à 10 mois. Aujourd'hui ils sont jeunes adultes et ils n'ont pas eut de soucis particuliers pendant leur enfance ou adolescence. Mon aînée à été sur le pot, à 5 mois, dans un baby relax pour un confort vertebrale. Depuis ses 4 mois elle n'urinait pas de la nuit et très peu la journée donc suite à l'avis de son pédiatre nous l'avons initier au pot que le midi après manger car pour ses selles elle été réglée. Pour le second, nous l'avions mis au pot à 6 mois, baby relax également car lui avait une fissure anal de naissance et des hurlement à chaque selle donc cela le soulageant et nous avions compris à un certain moment qu'il ne supportait pas d'être sal. Les enfants étaient chez une professionnelle qui a bien voulu faire comme moi suite à l'écoute de leur pédiatre. A 10 mois, plus de couche par contre le pot suivais partout. Bon à l'époque on ne savait pas malgré plusieurs questions poser à des professionnelles mais nos enfants viennent d'être déclarés Il. Donc il avait des dispositions des bb.
Bonjour, Enfin un article agréable à lire qui ne juge pas mais qui fait comprendre l'accompagnement à l'acquisition. Pour ma part même les professionnelles se moque de vous quand vous leur expliquer que vos propres enfants ont été propre à 10 mois. Aujourd'hui ils sont jeunes adultes et ils n'ont pas eut de soucis particuliers pendant leur enfance ou adolescence. Mon aînée à été sur le pot, à 5 mois, dans un baby relax pour un confort vertebrale. Depuis ses 4 mois elle n'urinait pas de la nuit et très peu la journée donc suite à l'avis de son pédiatre nous l'avons initier au pot que le midi après manger car pour ses selles elle été réglée. Pour le second, nous l'avions mis au pot à 6 mois, baby relax également car lui avait une fissure anal de naissance et des hurlement à chaque selle donc cela le soulageant et nous avions compris à un certain moment qu'il ne supportait pas d'être sal. Les enfants étaient chez une professionnelle qui a bien voulu faire comme moi suite à l'écoute de leur pédiatre. A 10 mois, plus de couche par contre le pot suivais partout. Bon à l'époque on ne savait pas malgré plusieurs questions poser à des professionnelles mais nos enfants viennent d'être déclarés Il. Donc il avait des dispositions des bb.