Ces micro-crèches qui détournent l’esprit de la loi

Des aides au fonctionnement et à l’investissement ont été conçues pour favoriser la création de micro-crèches sur les territoires ne disposant pas suffisamment de places en structures d’accueil collectives. Certains gestionnaires en ont profité pour créer deux micro-crèches mitoyennes. Ils échappent ainsi aux normes plus contraignantes des crèches et bénéficient du doublement des subventions. Une dérive que la CAF compte bien empêcher par un conditionnement plus strict des aides.
Les micro-crèches permettent de répondre à un besoin de places en structures d’accueil collectives, que ce soit en zone urbaine ou rurale. « Dans la Manche par exemple, il existait des crèches dans les villes de plus de 8000 habitants, mais elles étaient absentes des bourgs de moins de 2000 habitants, raconte le docteur Dominique Goriaux, membre du Syndicat National des Médecins de PMI. Des micro-crèches « satellites » ont donc été créées à 10 km des villes pour répondre à la demande des familles. Et chaque directrice d’une crèche est devenu également directrice d’une micro-crèche à proximité ». « En 2013, nous avons signé une convention avec l’Etat pour créer un fonds de rééquilibrage territorial destiné justement à augmenter le nombre de structures d’accueil de jeunes enfants sur ces territoires » explique Aymeric de Chalup, responsable du département enfance et parentalité à la Cnaf. Il s’agit d’une aide au fonctionnement délivrée par la CAF qui concerne, notamment, les micro-crèches.

La dérive des micro-crèches mitoyennes
Ces subventions et la croissance de la demande de la part des familles ont engendré quelques dérives. « Des gestionnaires ont créé deux micro-crèches à proximité l’une de l’autre, voire dans le même bâtiment, avec une seule directrice pour les deux structures et plus ou moins le même personnel, commente Dominique Goriaux. Ces gestionnaires prétendaient qu’il s’agissait de deux structures distinctes pour ne pas avoir les contraintes qu’implique la création d’une crèche collective. » Ce type d’établissement nécessite en effet d’embaucher une directrice qualifiée à temps plein et d’avoir un médecin référent, deux éléments qui augmentent le coût de fonctionnement de la structure. La souplesse du dispositif a donc entraîné un détournement de l’esprit de la loi par certains gestionnaires.

Limiter les aides à l’investissement
Pour éviter de nouvelles dérives, la CAF a décidé de renforcer les critères d’accessibilité aux aides à l’investissement. « Le plan crèche 2013/2017 vise à favoriser la réponse aux besoins des territoires. Dans ce cadre, des subventions à l’investissement ont été mises en place, auxquelles peuvent avoir accès les micro-crèches » souligne Aymeric de Chalup. Pour cela, elles doivent répondre à des conditions spécifiques : pratiquer une tarification en fonction des ressources des familles, y compris pour les micro-crèches financées par la PAJE, et renseigner leurs disponibilités sur le site www.mon-enfant.fr. « Cette année, un nouveau critère a été établi : deux micro-crèches mitoyennes ne peuvent pas être éligibles à ce fonds, indique Aymeric de Chalup. Notre levier de vigilance, c’est ce conditionnement de l’aide à l’investissement ».
Une vigilance qui, heureusement, n’est nécessaire que pour quelques gestionnaires. Car comme le remarque Dominique Goriaux, « ces micro-crèches jumelles sont marginales. En pratique les gens sont plus raisonnables que le législateur : ils ne souhaitent pas détourner l’esprit de la loi. »

 
Article rédigé par : Nelly Moussu
Publié le 19 avril 2016
Mis à jour le 13 août 2019