Égalité homme-femme : pour une meilleure inclusivité dans les métiers de la petite enfance. Par Ingrid Bergeaud

Suite à l’annonce de la proposition de loi pour l’instauration de quotas féminins dans les directions d’entreprise, Ingrid Bergeaud, présidente du réseau de crèches Eponyme, a souhaité réagir autour du problème inverse mais pourtant essentiel, selon elle, à l’avancée vers une meilleure égalité homme-femme : le manque d’hommes dans les métiers du « care » et particulièrement de la petite enfance.
Force est de constater que les métiers du “care” sont très féminisés notamment au sein de la petite enfance. Résultat : en crèche ou en accueil familial, les tout-petits ne sont quasi jamais en relation avec des hommes. Quelle image cela renvoie-t-il aussi bien aux petites filles qu’aux petits garçons ? Que seules les femmes sont capables de s’occuper des enfants ?

L’équipe d’Eponyme en est convaincue : agir pour une plus grande inclusivité au sein des métiers de l’éducation est le premier pas dans la lutte pour l’égalité homme-femme et contre les stéréotypes de genre.

Métiers de la petite enfance : lutter contre les stéréotypes femme / homme
À l’heure où une loi (plus que bienvenue !) vient d’être votée pour la mise en place de quotas imposant plus de femmes dans les directions d’entreprises, il faut aussi se poser la question : ne faudrait-il pas en imposer aussi au sein des métiers du « care » (prendre soin) ? Une vision difficile à tenir au regard du peu d’hommes suivant ce genre de filières. Selon le dernier rapport du Commissariat Général à la Stratégie et à la Prospective, les femmes représentent 97% des effectifs des structures collectives, et ce malgré l’ouverture des métiers aux hommes depuis au moins 40 ans ! A noter que le nombre de représentants masculins augmente à mesure que l’on grimpe dans l’échelle de l’éducation : ils sont 7% dans les écoles maternelles et 28% dans les écoles primaires.

Pourquoi ?
La réponse réside sans doute dans un imaginaire collectif qui persiste : les métiers de soin et notamment auprès d’enfants sont réservés aux femmes, comme un prolongement de leur devoir maternel. Comme si, encore en 2021, faire grandir des enfants n’était que l’apanage des femmes. Que les hommes n’y avaient pas leur place.

Un manque d'inclusivité préjudiciable
Les facteurs de ce manque d’hommes sont pluriels :
  • Les métiers de la petite enfance ne sont pas promus auprès des jeunes garçons
  • Les postes en petite enfance sont peu valorisés avec un faible niveau de qualification, et des salaires bas (de là à dire qu’il y a un lien, il n’y a qu’un pas… que l’on fait !)
  • Le peu d’hommes qui se lancent doivent souvent faire face à des a priori quant à leurs compétences voire leur virilité… !
Et certains, de poser encore la question : pourquoi changer cet état de fait ?

Tout simplement pour combattre les préjugés dès la petite enfance et avancer vers une éducation égalitaire, sans stéréotype de genre. La lutte contre le sexisme ne passera que par un schéma éducatif où l’homme a toute sa place, que ça soit au sein du cercle familial, mais aussi au sein des métiers de la petite enfance.

Des hommes en crèches : des retours d’expériences positifs
Depuis quelques années, de nombreux pays (notamment nordiques) mettent en place des actions couronnées de succès pour augmenter le nombre d’hommes au sein de la petite enfance., au Danemark 23% des postes sont occupés par des hommes, tandis qu’ils sont 10% en Norvège, notamment grâce à une politique de discrimination positive à l’embauche[1]. Des chiffres qui ne sont pas étrangers au fait que pays défendent une vision de l’éducation plus égalitaire et sans stéréotypes de genre, dès la toute petite enfance, axée sur l’enfant libre et autonome dans ses choix.

La sensibilisation, l’accompagnement et la valorisation sont donc des étapes clés afin d’inciter les hommes à s’impliquer dans des domaines réservés traditionnellement aux femmes.

Chez Eponyme, nous souhaitons avancer sur cette question et que nos crèches deviennent des « terres accueillantes » pour des professionnels hommes qui ont toute leur place auprès des enfants et dans nos équipes. Récemment un éducateur de jeunes enfants a intégré nos effectifs et le verdict est sans appel. Cette présence masculine, dans un univers trop souvent exclusivement féminin, a facilité le dialogue avec les pères et les a poussés à s’impliquer plus fortement dans la vie de la crèche. Une soirée entre papas où la parole s’était libérée avait ainsi pu être organisée[2].

Inclusivité et volonté politique
En tant qu’acteurs de la petite enfance, bien qu’engagés et convaincus, nous ne pouvons pas agir seuls ! Nous avons besoin d’une volonté politique forte pour :
  • valoriser les métiers du care auprès de la jeune génération (dès l’école primaire !),
  • donner aux hommes la possibilité de s’impliquer pleinement et au même titre que la mère dans l’éducation de leurs enfants. On pense notamment à l’allongement du congé paternité (dont une première étape sera franchie au 1er juillet 2021) qui permettra de voir se dessiner des schemas familiaux, des répartitions des tâches éducatives et domestiques, des équilibres pro-perso… plus égalitaires.

Les esprits changeront quand l’éducation égalitaire sera la norme. Et que nos enfants, grandis, feront leur choix de vie en Êtres libres et non selon un choix sexué, imposé par la vision qu’en a la société.


[1] Contribution de Frédéric Leprince, aux travaux de la Commission présidée par Sylviane Giampino « Pour un décloisonnement des métiers et des interventions en vue du développement complet du jeune enfant » - 2015

[2] L’EJE a par la suite intégré un service de protection de l’enfance où les hommes sont plus en nombre.


 
Article rédigé par : Ingrid Bergeaud
Publié le 20 mai 2021
Mis à jour le 27 mai 2021

2 commentaires sur cet article

Sur notre micro crèche nos avons la chance d'être 3 hommes au sein de la structure. Un apprenti CAP AEPE, un professionnel titulaire du CAP Petite enfance et moi EJE et référent technique de la micro crèche, nous avons eu également des stagiaires en filière ASSP garçon. En effet il est important d'avoir de la mixité dans ces métiers du care pour lutter contre les stéréotypes du genre et afin de contribuer à la juste place du père au sein des structures petite enfance
Sur ce site déjà on considère que seule une femme peu être assistante maternelle puisque lors de la création du compte l intitulé n existe qu' au féminin