Hommage à Simone Veil. Par Danielle Rapoport

Présidente d’honneur de « Bien-traitance, formation et recherches »

Simone Veil
   Simone Veil vient de s’inviter soudainement, au détour du Solstice d’été, dans une actualité politique comme revivifiée par sa personnalité, solaire justement, son intelligence et la mise en actes si efficace, rapide et cohérente, de ces engagements. Mais peut-être serait-il bon d’évoquer ici, car c’est moins connu d’elle, le rôle considérable qu’elle a joué au niveau de l’Aide sociale et de la Protection de l’Enfance, souvent de la toute petite Enfance, tout d’abord en tant que ministre de la Santé de mai 1974 à mars 1977, puis ministre de la Santé et de la Sécurité sociale de mars 1977 à mars 1978, enfin ministre de la Santé et de la Famille d’avril 1978 à juillet 1979. Nous nous amusions alors de ces appellations successives qui changeaient l’en-tête des papiers à lettres offciels, alors que nous en voyons aujourd’hui toute la portée progressive et innovatrice ! Celle, par exemple, qui a nourri et contribué à  la création ô combien récente du Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge.
    De mars 1993 à mai 1995, elle reviendra…comme ministre d'État : ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville, redonnant un nouveau souffle à tout ce qui avait été entrepris après elle, en particulier « l’Opération pouponnières » dont allait émerger le néologisme de bien-traitance, inscrit pour la première fois dans la langue française en 1997 par son Comité de Pilotage… Nous venons d’en fêter le 20ème anniversaire en lui rendant hommage avec émotion. Mais avant de lancer l’Opération pouponnières, il faudrait rappeler que dès les années 75, elle m’avait tant soutenue dans ce qu’elle appelait « l’humanisation de la pédiatrie », - choquant tellement les pédiatres hospitaliers par ce terme que j’avais dû le changer au moment de la circulaire de 1983, qui reprenait tous les points auxquels elle avait tant tenu, en particulier les chambres mère-enfant, la cassure des horaires des visites, la présence constante des parents, le « faire savoir » et le « savoir dire », le handicap ou la maltraitance. Alors qu’elle n’était pas parue au Journal officiel, cette circulaire n’a cessé de circuler, grâce en particulier à Sparadrap et à l’Afirem, qui venaient de voir le jour ! De même, si elle avait accepté en 1979, de nous décorer, Janine Lévy et moi-même, de l’Ordre du Mérite dans le cadre même du « Centre d’assistance éducative du tout-petit », c’est parce qu’il avait préfiguré pour elle le premier CAMS avant la lettre, que nous avions ouvert en 1971 alors que le décret n’allait en sortir...qu’en 1976.
Elle avait alors évoqué nos trois films, en gestation, qui allaient succéder à partir de 1972 à « Aide-moi à faire tout seul : l’éveil du tout-petit ou le plaisir partagé », et qu’elle appelait nos enfants : « Enfants en Pouponnière demande assistance », « Un hôpital pour les enfants »,  « Trois enfants parmi les autres ». Elle avait raison : les messages dont ils sont porteurs n’ont cessé effectivement de grandir, de devenir adultes, et sont à présent consultables sur Canal U (canal universitaire). Ils lui doivent tant…
    Et nous lui devons tant… Après la catastrophe de la canicule de 2003, responsable en France de plus de quinze mille morts dans la population des personnes âgées dépendantes et isolées, beaucoup m’ont sollicitée pour envisager une sorte d’« Opération EPAHD » à l’image de ce qu’avait été L’Opération Pouponnières. La transition démographique et épidémiologique que représente ce drame ne le permet pas, hélas. Mais nous en avons témoigné dans l’introduction d’un ouvrage récent (La bien-traitance au soir la vie. Avancer en âge, éd. Belin), introduction qui rend hommage, justement, à Simone Veil : « Dénoncer… Enoncer… annoncer », …pour ne jamais renoncer.
Article rédigé par : Danielle Rapoport
Publié le 03 juillet 2017
Mis à jour le 04 décembre 2020