Les Kyklos : la première crèche d’hôpital qui accueille les enfants de patients

Installé au sein de la crèche du personnel de l’hôpital Saint Louis à Paris, le multi-accueil Les Kyklos reçoit les enfants de parents traités pour un cancer. Une première en France. L’établissement permet à la fois aux patients d’avoir une alternative de garde pendant leur rendez-vous médical et de créer du lien social puisque l’autre moitié des enfants vient du quartier environnant. Zoom sur ce projet prometteur qui tend à se développer.
C’est dans la partie historique de l’hôpital Saint Louis que le multi-accueil Les Kyklos a pris ses quartiers. Un décor authentique pour un projet très innovant. C’est en effet la première crèche qui accueille non pas les enfants des professionnels de santé mais ceux des patients de l’unité d’oncologie.

Mieux répondre aux besoins des patients traités pour un cancer
A l’origine du projet, la volonté de Caroline Le Roux, psychologue clinicienne, et Véronique Mallet qui a travaillé durant toute sa carrière sur de nombreuses questions de santé publique, de participer au Plan cancer 2014-2019 (troisième version de l’action initiée par Jacques Chirac en 2003). Le 7e objectif du plan est d’« assurer des prises en charge globales et personnalisées et améliorer la qualité de vie par l’accès aux soins de support » et l’action 7.8 vise à « apporter des solutions de garde d’enfants pendant les rendez-vous médicaux et les traitements des parents ». Ensemble elles créent donc l’association Les Kyklos en 2014, avec le soutien des 4 autres membres qui en constituent aujourd'hui le conseil d'administration. En s’inspirant de la seule initiative semblable à leur projet : la halte-garderie de l’Union Départementale des Associations Familiales (UDAF) à l’hôpital Necker qui accueille dans sa crèche les frères et sœurs des enfants hospitalisés. « On est parties de notre expérience de terrain et de nos hypothèses, raconte Caroline Le Roux. Au cours de mes consultations, les parents malades se posaient souvent cette question : que vais-je faire de mon enfant en bas âge pendant mes rendez-vous médicaux ? Avant l’aspect psychologique, il y a aussi des problématiques d’organisation au sein des familles touchées par la maladie. » Certains parents ne se rendent pas à leur chimiothérapie, faute de mode de garde pour leur enfant.

Une structure ouverte depuis mars
Les deux femmes entreprennent un travail de recherche et se tournent vers l’hôpital Saint Louis qui comprend un pôle d'oncologie au Nord-Est de Paris. Des réunions avec les différents services de l’hôpital, l’accord de l’APHP, le soutien financier de la CAF et de la mairie de Paris, et enfin l’agrément le 20 mars qui leur permettent d’ouvrir les portes du multi-accueil Les Kyklos à 10 enfants de patients de manière ponctuelle ou en urgence, et 10 enfants Parisiens selon les modalités d’inscriptions habituelles. Caroline Le Roux prend la direction de la structure et de l’équipe qui compte une éducatrice de jeunes enfants (EJE) et 6 auxiliaires de puériculture, ainsi qu’une pédiatre et une psychologue intervenant régulièrement.

Une crèche classique avec ses spécificités
Ouverte du lundi au vendredi de 8h à 19h, la structure reçoit des enfants âgés entre 2 mois et demi et 4 ans. Elle a deux salles dédiées : une en rez-de-chaussée pour l’accueil des familles et pour la section des bébés et des moyens, une à l’étage pour la section des moyens et des grands. Mais, volonté de la part des deux directrices - Caroline Le Roux et la responsable de la crèche du personnel soignant -, certains espaces comme le jardin et la salle de psychomotricité sont partagés par tous les enfants. Les professionnels commencent par accueillir les enfants du quartier pour créer une régularité dans l'accueil et l’identité de la crèche. Des places qui ont tout de suite été prises : comme partout il y avait des besoins en termes d’accueil. « La réduction des inégalités sociales au sein de la crèche fait aussi partie de notre projet », précise Caroline Le Roux. L’équipe reçoit ensuite, fin avril, le premier enfant de parent soigné. Soit les demandes viennent directement des parents, soit la directrice se rend dans les services pour leur parler de ce dispositif. Si des parents sont intéressés, elle essaie de faire leur connaissance au moins un jour avant. « On part d’une adaptation classique - entre 1 et 3 semaines - et on ajuste, explique-t-elle. Parfois elle dure une minute, le temps que le parent dépose l’enfant et parte à son rendez-vous médical. » La priorité à ce moment-là ? S'assurer que l'enfant est à jour de ses vaccinations, première condition de son accueil à la crèche.

S’adapter en permanence
La particularité de cette crèche tient en ce que les professionnels font du cas par cas, du « sur-mesure », note Sophie Fraichefond, l’EJE. « On observe les besoins de chacun, on est vraiment dans l’individualité. Et c’est ce que nous plaît en tant que professionnels de la petite enfance ! » L’équipe demande aux parents un maximum d’informations sur les habitudes de l’enfant pour repérer ses éventuels besoins et angoisses, et s’adapte en fonction de ce qu’elle perçoit de la relation entre les deux. Ici, on accorde beaucoup d’importance aux mots employés et à ne jamais basculer dans le jugement. « Dans le contexte de l’hôpital, certains parents préfèrent ne pas rester plus longtemps que le temps de la consultation, souligne Caroline Le Roux. Nous tenons à montrer que la crèche est un endroit à part, qui donne envie aux enfants comme aux parents d’y venir ».

Revaloriser le rôle du parent
L’idée de cette crèche est de permettre que la famille existe. Tout comme les crèches ont maintenant le devoir d’accueillir l’enfant et ses parents, cette structure accueille le parent et son enfant. C’est d’ailleurs là tout le sens du nom « Kyklos » qui signifie en grec ancien « cercle », « rond », « cycle » : la crèche des Kyklos a à cœur de participer à la construction d’un nouvel équilibre au sein des familles touchées par la maladie. La réflexion de l’équipe s’articule autour de la manière de ne pas déposséder le parent de son rôle de parent, de le soutenir et de l’accompagner. « Pour moi être un parent malade, ce n’est pas être un demi-parent, analyse Caroline Le Roux. Ils doivent aussi avoir le choix de mettre leur enfant à la crèche. Et avoir le choix, c’est garder le contrôle et sa dignité. »

Un projet en développement
Le projet pédagogique des Kyklos s’appuie sur la pédagogie Pikler Loczy, notamment avec les principes de référence et d'autonomie. Certains membres de l’association  Pikler Loczy ont d’ailleurs prévu de rencontrer prochainement l’équipe de la crèche. Les premiers retours sont assez positifs pour le multi-accueil, une relation de confiance semble s’être instaurée entre les professionnels et les parents-patients. A tels point que certains d’entre eux demandent une place régulière. Par ailleurs les membres de l'association Les Kyklos ont mis en place une évaluation de la structure dès son ouverture, essentielle pour adapter son fonctionnement et pouvoir développer cette initiative à d’autres hôpitaux de Paris et sa région.
Article rédigé par : Armelle Bérard Bergery
Publié le 10 novembre 2017
Mis à jour le 09 décembre 2019

2 commentaires sur cet article

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