A Lyon, la crèche Prévert accueille des enfants des centres d’hébergement et d’insertion sociale

On le sait, les modes d’accueil ont un rôle à jouer dans la réduction des inégalités sociales. En ce sens, les crèches en particulier sont encouragées à favoriser la mixité sociale. Pour certaines, elle est au cœur même de leur ADN. C’est le cas de la crèche Prévert de Lyon, intégrée au Centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) La Charade, et gérée par L’association de Hôtel Social (LAHSo), qui accueille 9 enfants issus des CHRS et 6 enfants du quartier. Et cela fait 46 ans que cela dure. Zoom sur une initiative remarquable.
Du CHRS La Charade à la crèche Prévert
En 1974, L’Hôtel Social (LAHSo), une association engagée dans l’inclusion sociale, crée le CHRS La Charade dans le 3e arrondissement de Lyon, à l’attention des mamans isolées et de leurs enfants. Il propose au total 85 places : 83 en insertion et 2 en urgence pour des femmes victimes de violences conjugales. Rapidement, l’association se lance dans le projet d’une crèche. Un projet né d’un constat de terrain. Les mamans du CHRS n’ont en effet aucun moyen de faire garder leur(s) enfant(s) lorsqu’elles ont des rendez-vous administratifs, d’embauche, de formation… Deux ans après, en 1976 donc, la crèche Prévert, intégrée à La Charade, voit le jour pour répondre aux besoins de ces femmes. « L’objectif, explique Raphaël Rossignol, EJE et coordinateur de la crèche Prévert, c’est d’offrir à ces enfants un espace leur permettant de se mettre à distance des problèmes rencontrés par leur famille, qui peuvent prendre la forme de violences, de parcours migratoires compliqués. » Et comme la mixité sociale est l’essence même de la crèche Prévert, des places ont également été proposées aux enfants du quartier. Aujourd’hui, sur les 15 places de la structure, 9 à la journée sont réservées à des enfants des CHRS et 6 à des enfants des familles du quartier. « C’est important que les tout-petits des CHRS rencontrent d’autres schémas familiaux que le leur. D’où l’ouverture sur le quartier avec des familles qui pour la plupart ont un niveau socio-professionnel plus favorable », indique Raphaël Rossignol. 

Un accueil individualisé et pérenne
Pour accompagner tous ces enfants, une équipe composée de 2 EJE, 1 AP, 2 CAP AEPE et une chef de service qui se partage entre La Charade et la crèche. Sans oublier un contrat Parcours emploi compétences (PEC) et une cuisinière chargée également de l’entretien des locaux. Une équipe conséquente qui leur permet d’accueillir les enfants dans les meilleures conditions possibles et pour laquelle l’adaptabilité est le maître-mot. « Il nous arrive de faire de l’accueil d’urgence comme c’est le cas en ce moment pour une petite fille de 14 mois qui nous a été orientée par Le Point Accueil, une autre unité de LAHso qui accompagne des personnes et/ou familles sans domicile fixe. Dans ce type de cas, la séparation avec les parents peut être extrêmement difficile. Et bien souvent, pour les mamans de La Charade, la crèche ne fait pas partie de leur culture. On prend donc notre temps et on propose un accompagnement individualisé afin que parents et enfants soient en confiance », précise Raphaël Rossignol. A noter que la plupart des enfants, comme dans une crèche classique, restent jusqu’à l’entrée à l’école. Certains continuent même à y être accueillis en périscolaire jusqu’à leurs 4 ans. Et les mamans qui travaillent sont prioritaires. Les mères qui n’ont pas de profession savent donc que leur contrat est susceptible d’être modifié. 

Plusieurs actions de soutien à la parentalité
Outre la mixité sociale, l’accompagnement à la parentalité est l’autre spécificité de la crèche Prévert. En pratique, les parents sont libres d’investir la structure, de poser toutes leurs questions aux professionnels de la petite enfance. Un établissement qui se veut « familial » et où chacun se sent parfaitement à l’aise. Par ailleurs, un ou deux mois après le début de l’accueil d’un enfant du CHRS, Raphaël Rossignol reçoit, avec le référent du tout-petit, la maman afin de faire le point mais aussi d’en savoir un peu plus sur son parcours de vie. « Deux mois, c’est un laps de temps nécessaire qui permet à la maman d’être plus en confiance et de s’ouvrir à nous. Bien entendu, elle nous livre ce qu’elle souhaite », indique le coordinateur de la crèche. Et poursuit : « Des informations qui peuvent nous aider à mieux comprendre l’enfant et donc à mieux l’accueillir. » Ce rendez-vous est parfois organisé, à la convenance du parent, à son domicile. « Dans un contexte différent que celui de la crèche, les choses peuvent se dire plus facilement », précise Raphaël Rossignol. En parallèle, toutes les deux semaines, les professionnels de la crèche et ceux de La Charade se réunissent pour échanger sur la situation des mamans et de leurs enfants. Et décider si nécessaire de mettre en place un accompagnement plus spécifique de l’enfant et/ou du parent. Par ailleurs, des soirées à thèmes (le jeune enfant et les écrans…) sont organisées au sein de la crèche pour l’ensemble des parents, toujours dans l’idée de la mixité sociale. Des moments conviviaux rythment aussi l’année : une fête à Noël, un repas de fin d’année… Et les parents qui souhaitent participer à la vie de la crèche sont les bienvenus (lecture d’albums, animation d’une activité artistique…) !

Ouverture récente du LAEP Cocon au sein de La Charade
En parallèle et en lien avec la crèche, un espace de jeux aménagé a été ouvert au sein du CHRS de La Charade il y a un an. « Des assistantes maternelles du quartier s’y rendaient mais il a été décidé depuis septembre de le recentrer vers les familles », précise Raphaël Rossignol. Un espace qui est devenu un véritable LAEP et où toutes les familles, celles hébergées à La Charade, mais également les papas du CHRS « Bell’Aub » et celles du quartier sont invitées à se rencontrer, échanger. Le jeu y tient une place importante. Selon le coordinateur de la crèche, en effet, pour certains parents le rapport au jeu n’est pas évident et pourtant, il est essentiel pour le développement de l’enfant. Deux professionnels y accueillent les familles dont des pros de la crèche Prévert. Une double casquette pas forcément évidente à gérer pour ces derniers au fait des histoires de vie très compliquées des parents et enfants du CHRS. C’est pourquoi, ils sont accompagnés dans leur posture, leur positionnement professionnel, pour garder la juste distance nécessaire à leur mission au sein du LAEP. 
Article rédigé par : Caroline Feufeu
Publié le 01 décembre 2022
Mis à jour le 02 décembre 2022