Idées reçues sur l’organisation de la cuisine en crèche

Les torchons sont interdits, toutes les carafes se valent, on ne peut pas faire d’activités cuisine avec les enfants… Petite cure de detox sur tous les clichés qui ont la vie dure !
Toutes les carafes d’eau sont identiques
C’est faux ! Il faut vérifier que les pichets en plastique ne contiennent pas de Bisphénol A interdit dans tous les contenants alimentaires (bouteilles en plastique, canettes ou boîtes de conserve) depuis le 1er janvier 2015. Un indice pour vous y retrouver : le chiffre gravé dans le fond du flacon. Ca ne doit pas être un 3 (PVC-Polyvinyle Chloride) ; un 6 (polystyrène) ou encore un 7 (PC-Polycarbonate). Préférez une carafe en inox, incassable et saine pour la santé !

L’utilisation des œufs en coquille est interdite
Vrai et Faux.Voilà une idée reçue à nuancer et  qui pourtant perdure. La note de service DGAL/SDSSA/N2006-8200 du 7 Août 2006 fait le point sur les recommandations en matière d’utilisation des œufs en coquille au stade de la restauration collective. On peut y lire : les préparations crues à base d’œufs en coquille (mayonnaise, mousse au chocolat) sont déconseillées pour les personnes sensibles (personnes âgées ou jeunes enfants), mais il n’y a pas d’interdit formel. Evidemment il ne s’agit pas de confectionner un tiramisu, mais casser trois œufs pour réaliser un gâteau au yaourt est conforme à la réglementation. N’achetez pas d’ovo produit (ces œufs en bidon) car la qualité n’est pas rendez-vous. Vous devez bien sûr respecter les critères d’achat, de stockage et d’utilisation des œufs en coquille. Mais ce n’est pas très compliqué quand la démarche HACCP* est intégrée par l’équipe.

Il faut laver les œufs avant de s’en servir
Faux. C’est totalement inutile. D’une part parce que l’eau pure ne lave pas (il faudrait y adjoindre un détergent) et d’autre part parce que cela peut faciliter la contamination de l’intérieur de l’œuf. En revanche, il faut maîtriser les achats et les casser un à un sur un récipient avant de les incorporer aux autres ingrédients.

La compote ne peut pas être faite pour deux jours
Faux. Eh, bien si c’est tout à fait possible à condition que le refroidissement soit conforme à la réglementation et qu’on ait bien étiqueté les denrées dans le réfrigérateur pour la traçabilité. Cette pratique peut vous faciliter la vie  du personnel en cuisine et permettre des repas plus sophistiqués  car il n’y a plus la charge de l’épluchage tous les jours.

L’équipe ne peut pas faire d’activité cuisine avec les enfants
Faux, archi faux. Mais là encore un peu de bon sens suffit pour que des précautions élémentaires soient respectées.  A savoir : pas d’enfant, ni d’adulte malade ; tablier et charlotte pour tout le monde ; lavage des mains obligatoire ; une recette simple et devant être cuite ; la fiche recette disponible pour tout réussir ; remplir la fiche ou le cahier de traçabilité en notifiant la désignation des matières premières, leur DLC ou DLUO et leur numéro de lot, sans oublier le N° d’agrément communautaire pour les œufs. Enfin ne pas oublier de prélever entre 80 et 100g pour le plat témoin. Et il est impensable de jeter la préparation pour en préparer une autre en cachette, car baser cette activité sur le mensonge est tout simplement anti-éducatif.

Les torchons sont interdits
Vrai et Faux. Ils sont tolérés dans l’espace plonge, à condition de les mettre à laver dès qu’ils sont humides et non de les faire sécher sur le lave-vaisselle pour le repas suivant ! L’utilisation du jetable est onéreuse et non écologique. Mettre en place un protocole « torchons » est  judicieux, et même indispensable pour qu’ils ne servent pas à tout.

La légumerie est obligatoire, sinon il ne faut utiliser que des légumes prêts à l’emploi
Une pièce dédiée aux légumes c’est l’idéal. Mais c’est aussi plutôt rare. S’il n’y en a pas dans votre établissement  la marche en avant dans l’espace n’est obligatoire que dans les nouvelles cuisines), il suffit de bien s’organiser dans le temps et Il n’est donc ni obligatoire ni nécessaire de se rabattre sur du « prêt à l’emploi ». Il faut éviter les contaminations croisées entre les denrées alimentaires qui ont des niveaux d’hygiène différents. Concrètement il s’agit de définir dans une procédure : une zone sale dans la cuisine ; comment stocker les légumes (pas de terreux dans la zone propre) en caisse plastique, les pommes de terre dans l’obscurité. ; le moment où l’on va les laver : ce sera le matin avant toute chose, dès réception avant le stockage au réfrigérateur, en fin de production pour le lendemain avec mise au frigo.  En aucun cas, les légumes ne doivent souiller une  zone propre.

L’eau de javel est à proscrire
Faux. Alors pourquoi serait-elle préconisée pour décontaminer les fruits et légumes qui vont être consommés crus ? C’est vrai néanmoins que son utilisation est délicate. Il faut s’assurer qu’elle n’est pas périmée, la stocker loin des autres produits, ne pas la mélanger à d’autres détergents  et bien rincer les surfaces désinfectées sous peine de les abîmer. Certes, elle n’est pas le désinfectant de première intention, mais on n’a rien de plus efficaces pour aseptiser les surfaces propres notamment lors d’épidémies.

Seul le personnel de cuisine doit être  formé à la méthode HACCP*et à l’hygiène alimentaire
Faux. Comment la direction pourrait-elle accompagner et encadrer l’équipe si elle n’est pas au courant des obligations en matière de bonnes pratiques ? Elle doit aussi se former régulièrement afin que l’établissement soit toujours en phase avec la réglementation. Le personnel auprès des enfants doit aussi connaître les bases de la réglementation pour travailler en continuité avec la cuisine. En fait, toute personne oeuvrant en crèche doit avoir une formation plus ou moins poussée sur le sujet, sans parler des notions d’équilibre alimentaire.

Une cellule de refroidissement est obligatoire pour préparer des crèmes dessert
Faux, si vous prouvez qu’elles ont refroidi en passant de 63°C à 10°C en moins deux heures. En pratique, c’est assez simple. Il faut des ramequins, deux plateaux, des plaques eutectiques (blocs réfrigérants), un thermomètre et une pendule, sans oublier la feuille pour notifier les heures. Vous répartissez la crème dans des ramequins disposés sur un plateau, puis couvrez avec le second plateau  et vous faites un sandwich avec les plaques eutectiques. Trois quarts d’heure sur le plan de travail, vérification de la température (inférieure à 70° C en général), puis mise au réfrigérateur pour  deux heures (inférieure à 10°).

* HACCP: Hazard Analysis Critical Control Point, méthode et principes de gestion de la sécurité sanitaire des aliments
Article rédigé par : Sylvie Guillou, docteur en chimie, www.secali.com
Publié le 18 février 2016
Mis à jour le 13 mars 2016