Le sucre, douceur ou drogue dure ? Par Anne-Cécile George

Directrice de crèche, infirmière-puéricultrice

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Petite fille avec sucette
Il y a maintenant quelques temps que l’aliment préféré des enfants est banni à la maison. Un aliment que je concédais auparavant car il m’avait été donné régulièrement pour soigner mes coup de blues, mes coups de barre ou encore pour récompenser mes coups de bol. Un automatisme de l’enfance dans lequel je plongeais encore sous couvert de prétextes toujours plus inventifs, des excuses qui pourraient être les tiennes, lecteur. Oui, oui, toi qui lis cette chronique. Un aliment qui circule dans les crèches et dans les écoles. Pas sous le manteau. Non, non. Au vu et au su de tous les parents qui confient leur progéniture et qui n’en voient pas forcément les inconvénients. Un automatisme que nous nous efforçons de créer, et que nous perpétuons. Une drogue dure encore légale sur le territoire français et elle a pour nom : le S U C R E. Sirupeuse et Ulcéreuse Confiserie Renforçant l’Excitation.

Il est 16h, c’est le goûter d’anniversaire. Ethan fête ses 2 ans ! Avec ses camarades, ils ont droit à un bonbec (voire deux). Un quoi ?! Un bonbon, tu as bien entendu. Calmes et attentifs lors de la cérémonie des bougies, les enfants ingèrent la sucrerie. Drame et débandade : les professionnels se retrouvent au milieu d’une tribu de ouistitis, grimpant sur les tables, et faisant des facéties. « Ah mais vous étiez si sages les enfants, je ne comprends pas ce qu’ils vous arrivent ? » « Ce doit être l’excitation de l’anniversaire ». Oui, bien-sûr. Mais pas que. Pour m’être livrée à cette même expérience sur mes joyeux bambins, un petit bonbon anodin en guise de récompense (je sais, je ne sont pas des chiens), provoquent bien des turbulences en moins de temps qu’il ne faut pour l’admettre. Inexpérimentée que j’étais, il m’arrivait de dire « si tu te calmes, tu auras droit à une banana-chouette-acidulée ». Mais quelle erreur ?! C’est déjà suffisamment outrancier de faire du chantage à un enfant, si en plus on lui promet du sucre. Et je m’apercevais que les enfants n’étaient plus tout à fait eux-mêmes. Accros à leur drogue, ils étaient capables de se rouler par terre en période de manque pour obtenir le précieux délice qui les plongera dans l’apaisement (de courte durée, fut-il). Le cerveau demandant toujours plus.
Enfin, au risque d’en choquer plus d’un (tu parles), je vais faire mon coming-out : même moi je suis accro ! J’ai parfois cette envie impérieuse de pâte à tartiner qui fait saliver rien qu’à son évocation (attention cette chronique est dangereuse pour la santé, ceux qui sont en cours de désintox devront s’abstenir) et qui me joue des tours à mes heures perdues.

Le sucre, ennemi numéro un de notre foie, de notre ligne, mais aussi de notre cerveau, donc ! On pourrait dire « Oh, un bonbon de temps en temps… Ça ne va pas les tuer ?! ». C’est un fait. Cela se fera à petit feu. Insidieusement, comme le sucre qui se cache dans les différents aliments que nous consommons régulièrement : le petit Pitch à la fraise, le petit Kinder de mamie, les œufs en chocolat (« Joyeuses Pâques ! »… quelle déloyauté dont je fais preuve) mais aussi le ketchup et les sucres cachés dans les préparations salées !
Mais quels sont les autres effets néfastes (outre l’obésité, l’activation du système de récompense et cette envie irrépressible d’en consommer davantage car le sucre appelle le sucre) ? De récentes études ont démontré que notre serial-glucose perturbait les facultés d’acquisition et de mémorisation ! Si on ne finira pas tous atteints de la maladie d’Alzheimer ou diabétiques, on met toutes les chances de notre côté en en consommant toujours plus !

Alors pourquoi ne pas proposer des fraises (pas tagada et bio si on veut exceller dans la démarche), aux gouters exceptionnels ? C’est bon les fraises et c’est naturel. Pas de sirop de glucose, de sucres raffinés, de grignoteurs de matière grise et en prime un goûter zen sans débordements. Juste du fruit, du frais, du bon. (#sloganpublicitaire #bientôtlesprosdelapetiteenfancesponsordeslabelsbio)

Note : Pour démontrer le pouvoir du sucre sur notre cerveau, et le qualifier de drogue dure, je tiens à préciser qu’après l’écriture de cette chronique, je me suis préparée, malgré moi et toute ma bonne volonté, deux gaufres nappées de caramel au beurre salé.
Note bis : Je tiens donc à re-préciser que j’ai pris beaucoup de risques en écrivant cette chronique. Pour toi, lecteur.
Article rédigé par : Anne-Cécile George
Publié le 30 mars 2018
Mis à jour le 30 mars 2018