Bon sang, ouvrez les portes ! Par Arnaud Deroo

Consultant en éducation, thérapeute et psychanalyste, auteur

enfants jouant dehors
Imaginez, 300 m2 de crèche avec trois services : les bébés, les moyens et les grands. Elle est toute neuve, dispose d’une une salle de motricité, d’une pataugeoire, d’un grand couloir, d’un beau jardin ensoleillé.
Et les enfants ? Des bébés, des moyens, des grands qui tout l'après-midi resteront dans leur salle de vie… Je n'arrive pas à comprendre pourquoi cette maison pour les enfants n'ouvre pas ses portes pour permettre aux enfants de flâner dans tous les espaces qui leur sont dédiés. Non, ils restent et tournent en rond dans leur salle de vie. Certains dans la salle des grands, assis sur les genoux d'une professionnelle qui semble manquer d'inspiration ou d'énergie.

Ouvrir les portes, bien sûr, demande que les adultes s'éparpillent dans les espaces, ne restent pas entre eux, en troupeau, mais bien dans un regard vers l'enfant.
Comment se fait-il que les adultes n'élaborent pas ce type de fonctionnement ? Comment se fait-il que sur un après-midi, alors que le soleil était au rendez-vous, les enfants n'ont pas eu la possibilité d'aller dehors, courir, jouer ou prendre l'air tout simplement ?

Plus de 150 m2 pas utilisés alors que chaque lieu de vie compte plus de 20 enfants, et que l'on sait que le groupe est source de stress pour les enfants et adultes et qu’il peut entrainer des comportements non adéquats chez l'enfant comme chez l’adulte : « arrête, non ne cours pas ! »
Non ! On choisit plutôt de rester dans la salle quasiment vide de jeux. La pataugeoire qui a été réaménagée en salle sensorielle reste déserte. La salle de motricité sera utilisée quelques temps par l'éducatrice avec les bébés alors que les grands font de l'équilibre sur des briques en carton et sur les chaises, qu'il n'y a pas de coins différenciés d'expérimentations et que les moyens commencent à se pousser, à courir dans tous les sens et à jeter les jouets !

Et que fait l'auxiliaire assise sur le sol avec 4 enfants sur les genoux ? Est-ce judicieux ? Cela semble freiner les expérimentations des enfants qui sont dans une passivité attristante. L'auxiliaire a peut-être passé une soirée agitée, fatigante, elle a besoin de se reposer. Ça tombe bien, les enfants semblent avoir besoin d’un câlin puisqu'ils sont tous sur ses genoux ! Je n'en suis pas sûr.
Tout est réflexion dans une crèche, même le positionnement des adultes dans la salle.

Observez, pensez votre pratique, sinon vous allez vous fânez. Je l'ai déjà dit et je le redis, la répétition est bonne : ouvrez les portes, élargissez leurs découvertes, leur autonomie.
C'est possible. Je me rappelle de cette autre crèche où l'EJE me présentera son fonctionnement en disant que cela lui a demandé quelque énergie. Les enfants se baladent, certains vont dans la salle bibliothèque, d'autres sont en motricité, et d'autres font de la peinture ou manipulent des graines… Mais ce qu’ils font, ils l'ont réellement choisi, et c’est cela la base de la motivation, du goût d'apprendre.
Article rédigé par : Arnaud Deroo
Publié le 05 mars 2018
Mis à jour le 05 mars 2018
Ouvrir les portes c'est peu être aussi un peu, ouvrir son esprit, et cela pose surement pour certains pros des difficultés !!!