Rapport de la commission d’enquête sur les crèches : le financement et la qualité d’accueil en question

Les membres de la commission d’enquête parlementaire sur le modèle économique des crèches et la qualité d’accueil dans les EAJE auront à se prononcer ce lundi 27 mai en fin d’après-midi sur le projet de rapport signé de Sarah Tanzilli, députée Renaissance du Rhône, la rapporteure de la commission. Lors d’une ultime réunion à huis clos, par leur vote ils devront décider s’il peut ou non être publié. Le projet de rapport exonère le secteur privé lucratif de toute responsabilité dans la dégradation de la qualité d’accueil dans les crèches. Mais propose 73 recommandations qui vont à l’encontre de ce que ce secteur défend.
 
Le projet de rapport de Sarah Tanzilli est volumineux  (279 pages) et paradoxal. Il dresse un constat de la situation de l’accueil du jeune enfant dans les crèches en ligne avec les rapports précédents, notamment celui de l’IGAS sur la prévention de la maltraitance et la qualité d’accueil dans les crèches d’avril 2023 et celui plus récent sur le financement et la qualité d’accueil dans les micro-crèches Paje de l’IGAS-IGF. Dans une deuxième partie, il présente 73 recommandations. Certaines sont à déployer le plus tôt possible, d’autres sont à envisager à l’horizon 2027 pour la prochaine COG.
 
Des dysfonctionnements systémiques
Le rapport pose clairement que les défaillances, dysfonctionnements et dégradation de la qualité d’accueil ne sont pas la conséquence de l’ouverture des crèches au secteur privé. Bref, la financiarisation du secteur n’y est pour rien. Car toutes les crèches de tout statut sont concernées. Et ces dysfonctionnements résultent du modèle économique et des règles de fonctionnement des crèches.

Instaurer un cercle vertueux de la qualité d’accueil
Pour la rapporteure, il faut prioriser la qualité d’accueil vs la quantité de places, revoir tout le modèle économique et de financement des crèches. Car actuellement c’est un cercle vicieux : on veut absolument pour répondre aux besoins des familles accueillir le maximum d’enfants, la pénurie de professionnels engendre des conditions de travail et conditions d’accueil dégradées.… Ce qui ne va pas dans le sens de l’attractivité des métiers de la petite enfance. Il faut inverser la tendance en ouvrant plus de places de formations et en réformant la PSU.
Côté micro-crèches Paje, le rapport propose de les aligner progressivement sur les autres EAJE, tant sur les normes que sur le financement pour mieux utiliser la dépense publique et respecter l’égalité d’accès inhérent à tout service public.

Des recommandations à court et moyen terme
Sur le modèle économique : la suppression du dispositif des réservations de berceaux par l’employeur, la suppression du Cifam ; le passage des micro-crèches à la PSU à l’horizon 2027 ; une PSU simplifiée, forfaitaire et généralisée dans la prochaine COG qui couvre les coûts liés à la qualité.
Sur les taux d’encadrement : mettre fin dès à présent au régime dérogatoire des micro-crèches notamment en exigeant deux professionnels à tout moment de la journée ; à l’horizon 2027, viser 1 professionnel pour 5 enfants sans distinction d’âge et d’ici 2030 cibler un professionnel pour 4 enfants.
Et aussi : création d’une carte professionnelle nécessaire à l’exercice d’un métier de la petite enfance ; mise place d’un guichet unique au niveau communal pour faciliter l’accès à un mode d’accueil des parents et instauration d’un portail national unique de demande d’une solution d’accueil.

LFI propose un contre-rapport
Dans la foulée, William Martinet (qui est à l’origine de cette commission d’enquête parlementaire mais qui avait été privé d’un poste clef, président ou rapporteur) et les députés de La France Insoumise ont annoncé avoir préparé un contre-rapport.
Nettement moins volumineux (28 pages) mais écrit au vitriol, ce rapport prend le contre-pied de celui de la rapporteure, en tout cas en ce qui concerne le constat. Pour les auteurs, il est clair que la présence du secteur privé lucratif a participé de la dégradation de l’accueil et de la dérégulation du secteur. Le tout avec la complicité des pouvoirs publics. Clair aussi que la marchandisation du secteur est un danger pour la petite enfance et le futur service public de la petite enfance et qu’il est temps de mener une politique volontariste passant par le gel des ouvertures de places du secteur privé lucratif pour redonner des couleurs au secteur public et associatif. Il s’agit aussi bien sûr de revoir les normes en vigueur et de soutenir la formation des professionnels.


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Article rédigé par : C.L
Publié le 26 mai 2024
Mis à jour le 10 juin 2024