« La main verte ». Par Bernadette Moussy

EJE, formatrice (enseignement des courants pédagogiques)

tistou les pouces verts
Il peut arriver que dans une équipe de professionnels qui accueille des tout-petits, on soit en recherche d’arguments pour mobiliser certaines collègues qui « savent comment on s’occupe des enfants puisqu’elles font cela depuis 25 ans » ou qui s’ennuient plus ou moins ostensiblement quand elles sont avec eux. Il y a aussi celles (ou ceux) qui sont pressées de finir les changes, les repas, la sieste et pour qui toute nouvelle idée est comme une agression. Et il y a d’autres cas de figure auxquels chacun peut penser.
Ce qui va suivre n’est pas un conseil, juste une idée.  Ce n’est pas une recette non plus, il n’y a aucune assurance pour que ça marche. C’est un partage.

Je propose donc ce dialogue imaginaire au cours d’une réunion d’équipe :
La responsable :
- Est-ce que quelqu’un parmi vous a la main verte ?
Surprise dans l’équipe :
- Pourquoi ? Vous voulez qu’on fasse du jardinage ?
- Moi je ne suis pas venue travailler ici pour ça.
- Non il n’est pas question de cela, quoi que…pourquoi pas. Mais ce n’est pas le sens de ma question. En fait y en a-t-il ici qui aiment jardiner. Il me parait intéressant d’introduire quelquefois dans nos échanges ce qui nous plait de faire dans la vie, sans plus. C’est important d’avoir quelque chose qui intéresse même en dehors du travail.

La responsable vient de semer, elle attend…

S’en suit un échange entre les membres de l’équipe :
- Moi, j’ai un petit jardin en dehors de la ville et j’y vais régulièrement.
- Qu’est-ce que tu cultives ? des légumes, des fruits, des fleurs ?
- Je préfère faire pousser de framboises, des groseilles pour faire des confitures et mon mari s’occupe des arbres fruitiers. Chacun son travail. On fait équipe.
- Moi ce sont les salades, les carottes, les pommes de terre. Des légumes que nous consommons. J’en suis fière et de plus ça fait des économies.
- Le moment que je préfère est lorsqu’après avoir planté ou semé, j’attends. Je vais voir régulièrement et j’ai hâte. Mais je sais qu’on ne peut forcer la nature. Par contre je fais attention à ne pas semer n’importe où. Je prépare la terre, j’arrache les mauvaises herbes.
- Il parait qu’on ne dit plus « mauvaises herbes », mais « herbes dont on ne connait pas encore l’utilité ».
- N’importe comment il faut bien préparer sinon ça pousse mal.
-Tient on pourrait planter des fleurs dans une jardinière. On la mettrait dans la petite cour. Ce serait bien plus gai. Je vais en apporter une.
- Je peux apporter des graines.

La responsable vient de semer, elle attend…

Alors la cour s’embellie de quelques couleurs, il faut une ou deux responsables pour entretenir. On s’organise. Les parents trouvent ça bien et un papa apporte de la terre… Ce serait bien si on semait du gazon pour jouer dessus plus tard.
Mais aussi, les enfants vont participer à l’entretien des plantes. On va commencer par trois ou quatre avec qui on va semer. On achète des petits livres sur les plantes. Un jeu de reconnaissance des fleurs que l’on a semer…On fait des photos. Des parents se préoccupent, d’autres pas.

La responsable vient de semer, elle attend…

Un jour, au cours d’une réunion d’équipe on fait le point sur les plantations. Il est question de surveiller, de connaitre les particularités de chacune pour savoir quand les semer ou les planter. Il est question de les observer, de laisser la nature faire après en avoir pris soin. Il est question de bien préparer la terre, de savoir attendre, de se sentir responsable, de partager cette responsabilité pour savoir où on en est. D’alterner entre bonnes surprises et déceptions…

Quelqu’un a dit mais c’est comme avec les enfants !
En pédagogie on appelle ça « le détour »

 
Article rédigé par : Bernadette Moussy
Publié le 11 octobre 2018
Mis à jour le 11 octobre 2018