Viviane Boileau : une assistante maternelle au grand cœur

A 69 ans et avec 30 ans de métier derrière elle, Viviane Boileau n’est pas prête de prendre sa retraite. Assistante maternelle à Ploufragan dans les Côtes-d’Armor (22), elle accueille des enfants dont certains sont en situation de handicap. La mixité, un choix qui lui tient à cœur et qu’elle souhaite étendre.
Se spécialiser sans formation 
Viviane Boileau a dédié sa vie aux enfants en tant qu'animatrice en centre de loisirs ou colonies de vacances, directrice pédagogique, enseignante et aujourd’hui en qualité d'assistante maternelle. Elle a accueilli durant de nombreuses années des enfants au développement normal. Un jour, une puéricultrice lui demande d’accueillir un enfant en situation de handicap : « J’ai immédiatement accepté. Je ne savais pas vraiment dans quoi je me lançais, mais pour moi c’était un enfant comme un autre ».
 
Avant d’être assistante maternelle, Viviane avait pour habitude d’accueillir chez elle et à titre bénévole, des enfants confiés par le Secours Populaire Français pendant un mois. Mais ces accueils n'ont rien de comparable au travail qu’elle fournit à présent. Pour accueillir des enfants en situation de handicap, elle s’est formée seule : « le département dans lequel je me trouvais à l'époque m’a refusé la formation que j’avais demandée ». Des connaissances qu’elle a alors acquises à travers ses lectures et lors des formations qu'elle se finançait elle-même et suivait sur ton temps personnel.
 
Pour Viviane, les assistantes maternelles qui accueillent des enfants en situation de handicap ont besoin de formation, d’aide de la Protection Maternelle Infantile (PMI) et de soutien des professionnels de santé qui suivent l'enfant. « J’ai dû me former sur le tas, et je trouve ça inacceptable. Accueillir des enfants en situation de handicap est stressant et compliqué quand on n’est pas formé ». Toutefois, elle ne souhaite pas être une « spécialiste du handicap » et préfère garder un peu de spontanéité dans l'accueil des enfants. Mais ça n’a pas empêché Viviane de continuer dans sa lancée. Son accueil mixte se fait maintenant par période : « J’accueille des enfants handicapés uniquement quand la situation l'exige ».
 
Anticiper les besoins de chaque enfant 
Les enfants porteurs de handicap ne sont pas les seuls à être accueillis par Viviane. Des tout-petits ou des plus grands atteints de maladies graves, comme le cancer ou le diabète, ont passé la porte de l'assistante maternelle. « Chaque petit est différent. C’est à moi de m’adapter au mieux à son problème de santé et à ses besoins ». Afin de leur assurer un accueil de qualité, elle travaille en collaboration avec des professionnels de santé, tels que des psychomotriciens, quand c'est possible. Ils la conseillent et lui apprennent les « bons réflexes » pour chaque type de handicap.
 
Lorsque les petits sont atteints d’un handicap mental comme l’autisme ou la trisomie, Viviane affine encore plus son observation. Elle anticipe le plus possible leurs comportements pour éviter les réactions violentes liées au stress d'une nouvelle activité, d'un nouveau déplacement. S'occuper de tout-petit avec un handicap reste tout de même fatiguant. « On doit parfois beaucoup porter, et l'adaptation permanente aux situations demande beaucoup d'énergie ». 
 
La mixité : une adaptation qui vaut la peine
« La mixité est absolument nécessaire ». Viviane n’a pas de pièce dédiée à l’accueil des enfants en situation de handicap (elle n’a pas reçu d’enfant en fauteuil mais a dû acquérir des poussettes et des sièges-auto spécifiques) car elle ne voit pas l’intérêt de les séparer des autres. Au contraire, ceux-ci apportent beaucoup avec leurs regards ou leurs gestes. Ils sont « moteur » pour celui qui a des difficultés et une entraide spontanée se met en place. La mixité constitue également un bon apprentissage pour tous les enfants, chacun apprenant à l’autre en difficulté ou pas. D’ailleurs le mot « handicap » n’est pas prononcé par les enfants et le handicap n’est pas vécu comme une différence. Au départ, les plus grands questionnent sur le nouvel arrivant mais un fois les réponses obtenues, claires et franches, il n’y a plus d’étonnement et pas de crainte. 

Il est arrivé qu’un parent n’apprécie pas l’arrivée d’un enfant souffrant de handicap (par crainte de favoritisme, par exemple). Il a alors fallu prendre le temps d’expliquer la nouvelle organisation. Evidemment, pour tout nouvel accueil, l’organisation bouge et en cas de handicap ou de maladie, il faut réfléchir davantage pour que chacun dans le groupe soit au mieux et trouve sa place.
 
Une détermination sans faille

« Je n’ai pas vraiment cherché à accueillir des enfants en difficulté de santé, mais je suis très heureuse de le faire. Chaque nouvel accueil a été le hasard d’une rencontre avec une famille qui cherchait une assistante maternelle ». Ce type d’accueil permet à Viviane de développer ses compétences, son expérience, mais également de renforcer sa confiance en elle et a fait évoluer ses pratiques professionnelles inévitablement.
 
Chaque enfant en situation d’handicap marque Viviane. Cet enfant impose sa réalité. C’est le cas de Guilin, un petit garçon âgé de 3 mois à l’époque. Un enfant en apparence sans problème, mais très vite, l’assistante maternelle a des doutes concernant son développement. « Il avait le regard vide et fuyant, ne se plaignait jamais et ne répondait pas aux stimuli sonores et visuels ». En effet, vers ses 7 mois, Viviane apprend que Guilin a gardé des séquelles après avoir frôlé la mort subite du nourrisson à l’âge de 2 mois. Une fois le diagnostic posé, ses parents ont craint que Viviane ne veuille plus l’accueillir, mais cela n’a pas entamé sa détermination. Les professionnels de santé qui accompagnaient l’enfant lui ont donné des pistes pour créer des activités ludiques en lien avec les activités de soin. Des ateliers qui lui ont servi par la suite pour tous les groupes d’enfants, notamment avec des petits prématurés. « Parfois je me sentais incompétente ou découragée devant certaines difficultés et mon manque de formation, mais je pense avoir fait en sorte que Guilin et les autres, reçoivent le meilleur accueil possible ». 
Article rédigé par : Julia Dumoulin
Publié le 26 juillet 2018
Mis à jour le 23 avril 2021