6 idées reçues sur la PSU
La préparation de la COG 2023-2027 est l’occasion de reposer la question du finanacement des modes d’accueil. La PSU doit-elle, peut-elle, être améliorée ou faut-il l’abandonner purement et simplement au profit d’un autre système plus juste, plus simple mais efficace et n’entraînant pas des dépenses supplémentaires pour la Cnaf ? Les avis ne sont pas tranchés. On fait le point sur les plus et les moins de cette Prestation de Service Unique qui depuis sa création en 2002 et ses réaménagements de 2014, a fait couler beaucoup d’encre.
1. La PSU est un système juste pour toutes les familles
VRAI
Elle permet de faire payer aux familles le juste prix, celui qui correspond le plus à la présence effective de leur enfant en crèche et à leurs ressources grâce au barème national mis en place. Explications : depuis sa création – et c’est le principe de la tarification horaire – il s’agit de s’adapter aux familles qui n’ont pas toutes un besoin d’un accueil à temps plein. Et qui n’ont pas toutes un niveau de revenus identique. Ni des besoins horaires de même amplitude.
La PSU s’appuie sur une philosophie de service public : permettre une égalité de traitement, égalité d’accès avec une même tarification dans tout le pays.
2. La PSU assure la solvabilisation des EAJE
VRAI MAIS…
C’est en tout cas ce qu’affirme la Cnaf qui, sur une échelle de 10 ans, se targue d’un bon bilan. Entre 2012 et 2019 (l’année 2020 étant à juste titre considérée comme atypique étant donné la crise pandémique que traversait le pays), la part des Caf dans le fonctionnement des EAJE est passée de 43,8% à 48,2%. Tandis que la part des co-financeurs (collectivités) et gestionnaires a diminué de 37% à 34,4%.)
Globalement en dix ans, le taux de financement par les Caf a été augmenté de 4,4 points et celui des co-financeurs
de 2,2 %.
Et pourtant sur la même période le prix de la place a augmenté en valeur absolue de 16,5%. 75% de cette augmentation de coût ont été pris en charge par la Branche Famille.
3. La PSU permet une gestion à long terme des EAJE.
FAUX MAIS…
L’un des reproches faits à la PSU c’est qu’elle est assez insécurisante pour les gestionnaires puisqu’elle s’appuie sur les heures facturées qu’ils ne maîtrisent pas forcément. Heures facturées comme on l’a vu, qui constituent un système juste pour les familles et qui, de plus, incitent à recevoir plus de familles tout au long de la journée en accueil occasionnel ou régulier. Objectif pas toujours facile à remplir : rares sont les parents qui ont besoin d’une place d’accueil exclusivement de 7h à 9h ou de 17h à 19h…
Mais pour contrebalancer cet effet un peu aléatoire, et pérenniser les EAJE existants, la Cnaf lors de la COG 2018-2022 a mis en place des forfaits qui constituent une aide à la place et non plus à l’heure. Cette aide actuellement via les bonus est de 10,1% (en 2018, elle ne représentait que 4% du financement apporté par la Branche Famille). Insuffisant disent les gestionnaires… d’autant qu’excepté le bonus territoire (CTG) pour les collectivités territoriales, les autres – mixité sociale et handicap – ne sont ni très conséquents ni très faciles à obtenir.
La question qui se pose : faut-il revaloriser les forfaits et en créer d’autres pour atteindre les 20 à 25% de part de financement visés par la Caf ou bien déconnecter la partie forfaitaire de financement des bonus et lui donner une place encore plus importante ?
4. La PSU fait peser une pression sur les gestionnaires.
VRAI MAIS…
On touche au fond du problème. En 2014, pour corriger certaines dérives et fraudes constatées, le calcul de la PSU a changé. Il s’est appuyé sur un barème établi selon deux critères : le service rendu et le taux de facturation.
Le service rendu s’évalue selon que les couches et les repas sont fournis. Le taux de facturation (écart entre heures facturées et heures réelles) s’établit, lui, selon trois modalités. Soit il est inférieur ou égal à 107%, soit il est compris entre 107% et 117%, soit il est supérieur à 117%. Ces modulations entraînent des prix plafonds horaires différents et la PSU correspond à 66% du prix plafond retenu, selon les cas.
D’où des effets de seuil jugés injustes et aboutissant à des diminutions de PSU brutales voire à des redressements a posteriori mettant des EAJE de bonne foi en grandes difficultés. Et d’où, une incitation à des pratiques permettant de toucher la plus haute PSU pour obtenir une meilleure rentabilité. Voilà comment les nouveautés de 2014, destinées à encourager et soutenir les EAJE les plus vertueux et au bout du compte à rendre un service le plus adapté aux parents, ont abouti à des dérapages et à compliquer la vie des EAJE.
5. La PSU participe à la dégradation des conditions de travail des professionnels d’EAJE
VRAI
Pas la peine d’être grand clerc pour le savoir. Les réseaux sociaux pullulent de témoignages, tous plus alarmants les uns que les autres. Les pros n’en peuvent plus. Ils sont au bord du burn out. Et outre la pénurie et le travail en sous-effectifs, la PSU y est pour beaucoup. Les gestionnaires ont la pression pour toucher une bonne PSU et par ricochet mettent la pression sur leur directrices et leurs équipes pour que l’écart entre les heures facturées et les heures réalisées soit le plus faible possible… donc le plus avantageux financièrement pour le gestionnaire. Les directrices sont noyées dans l’administratif et les chiffres ; les équipes n’en peuvent plus. Elles ont le sentiment de travailler à la chaîne et de ne pas offrir aux enfants un accueil de qualité. Et il semblerait que cette course à la PSU soit plus prégnante dans les EAJE privés du secteur marchand.
6. Peut-on vraiment parler de taux de remplissage ?
FAUX
Un slogan de Pas de bébés à la consigne était : les bébés ne sont pas des sardines ! Et il ne faut pas les entasser dans les lieux d’accueil comme des sardines à l’huile dans leur boîte de conserve. Certes. Mais selon les chiffres de la Cnaf, le taux d’occupation réel des EAJE est de 62%. Ce qui ne dénote pas une occupation éhontée des crèches. Il était de 60,4% en 2010 (avant la V2 de la PSU mise en place en 2014).
Catherine Lelièvre
PUBLIÉ LE 27 septembre 2022
MIS À JOUR LE 21 mars 2023