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Contrôles des EAJE : le nouveau rôle des départements. Le point avec Sophie Levesque, vice-présidente du CD de l’Oise

Sophie Levesque est vice-présidente du CD de l’Oise en charge de l’Enfance, la Petite Enfance et la Famille. Elle exprime ici, au nom de Départements de France, l’inquiétude des CD vis-à-vis des nouvelles compétences en matière d’accueil du jeune enfant que leur confère la loi pour le Plein Emploi. Elle ne voudrait pas qu’à l’instar de ce qui se passe pour la Protection de l’enfance, l’État se décharge de ses responsabilités sur les départements. Qui plus est dans un contexte budgétaire particulièrement tendu et contraint. Et, plus généralement, Sophie Levesque s’interroge sur la mise en place du SPPE en 2025.

Avec la loi sur le Plein Emploi du 13 décembre 2023, même si ce sont les communes qui deviennent autorités organisatrices du Service public de la petite enfance, les départements, notamment via l’article 18 de la loi, se voient eux confier de nouvelles responsabilités dans l’accueil du jeune enfant. Et notamment en ce qui concerne les contrôles des EAJE et les sanctions pouvant s’y référer.
Puisque désormais, conjointement avec le préfet, le président du Conseil départemental doit établir un plan pluriannuel de contrôle des modes d’accueil et, de plus, il partage aussi avec lui un pouvoir de sanction. (voir encadré).
« Bien sûr la loi Plein Emploi rééquilibre les pouvoirs entre préfet et président de Conseil Départemental. Et c’est plutôt une bonne chose », analyse Sophie Levesque. Mais notre crainte c’est que l’État en profite pour se décharger complètement sur les départements. Nous pourrions alors nous retrouver dans la même situation que pour la Protection de l’enfance où l’État a renoncé et où les départements assument tout », note-elle d’emblée.

Des contrôles conjoints et coordonnés pour monter en qualité
Personne, et surtout pas les départements dont dépendent les services de PMI, ne peut être opposé à des contrôles plus fréquents axés sur la qualité d’accueil.  Tous les départements via leurs PMI assument déjà ce rôle. Certains départements ont même mis en place des cellules spécifiques dédiées aux contrôles dans les crèches. Et d’autres depuis plusieurs années déjà organisent des contrôles coordonnés avec les Caf. « Dans l’Oise, nous travaillons en bonne intelligence avec notre Caf depuis de nombreuses années. Nous procédons à des contrôles inopinés, et si nous décelons des problèmes ou irrégularités, nous prévenons la Caf. Nous communiquons sur les contrôles et en organisons de communs au moins trois ou quatre par an et éventuellement avec les services vétérinaires si cela concerne l’alimentation », précise Sophie Levesque. Et ajoute : « après le drame de Lyon nous avons eu une réunion à la préfecture pour parler contrôles. Avec la Caf nous avons expliqué notre fonctionnement. Nous l’avons même écrit dans une note qui devait être transmise au ministère. Mais nous n’en avons plus jamais entendu parler », ironise-t-elle.

Le fait que désormais ces contrôles soient coordonnés et partagés avec les Caf, les ARS, les services de l’État, voire l’IGAS, permettra-t-il d’améliorer l’efficacité des contrôles ? « Ils sont déjà efficaces », affirme l’élue de l’Oise. Elle poursuit : « Aujourd’hui notre problème, alors même que les décrets ne sont pas sortis, c’est que les services de l’État, le préfet en l’occurrence, dès qu’il y a un problème renvoie vers nous, le département, alors même qu’il est clair que nous sommes en co- responsabilités et co-décisions. J’ai un exemple précis. Depuis six mois nous suivons une crèche qui est dans le rouge sur bien des plans. Il y a trois mois nous avons alerté la préfecture. Trois mois plus tard, on vient de nous répondre : avec la nouvelle loi c’est à vous de décider, à vous de sanctionner. » Un exemple qui illustre parfaitement les craintes des départements. « Et dans les départements, les services juridiques ont intérêt à être costauds », s’inquiète déjà Sophie Levesque. Et de conclure sans détours : « Chez nous, la volonté de la préfecture c’est : aux départements de mener les contrôles, aux départements de sanctionner. Espérons que les décrets d’application, à la rédaction desquels Départements de France est associé, seront clairs et nets sur le partage des responsabilités. ».
La gouvernance mise en place par la loi est complexe. Elle exige un partage d’informations entre tous les acteurs, avec à la clef un enjeu majeur : la qualité d’accueil. Cela peut prendre du temps pour que chacun prenne ses marques et sa part de travail et de responsabilités.

De nouvelles obligations à moyens constants
On le voit bien contrôles partagés et coordonnés ne signifiera donc pas que les départements ne seront pas en première ligne. Au contraire. Cela va reposer sur les équipes de PMI et ce sera difficilement réalisable.  Car il y a pénurie de professionnels, pénurie de moyens. « Cela se fera forcément au détriment des autres missions de la PMI : la prévention et l’accompagnement », regrette Sophie Levesque. « Car tout cela doit être fait à moyens constants ! Or, pour les contrôles il faut du personnel ! Et quand sanction il y aura… comme nous avons parfois de gros réseaux de crèches en face de nous, cela donnera lieu à des batailles juridico-administratives qui nécessiteront d’avoir dans nos services des juristes chevronnés et en nombre suffisant. »
« Il va vraiment nous falloir des moyens supplémentaires », insiste Sophie Levesque. Sans compter que désormais les autorisations d’ouverture ne sont données que pour 15 ans. Et que la loi prévoit aussi que l’année suivant l’ouverture, il doit y avoir une première visite de contrôle puis un contrôle tous les 5 ans.
Zéro moyen pour mettre cela en œuvre…  Sophie Levesque est sceptique vu l’état des finances des départements. Aujourd’hui, ce ne sont plus 14 départements qui sont dans le rouge, mais 29 !
Et, l’élue n’est pas loin de penser que si les services de l’Etat sont si prompts à se désengager, c’est qu’eux aussi manquent de moyens !

Le rôle des départements dans la mise en place du SPPE
Bien sûr les communes sont désignées autorités organisatrices du SPPE par la loi. Néanmoins, les départements devront les accompagner. Sophie Levesque insiste sur le rôle des départements pour informer les maires sur leurs nouvelles obligations. « C’est souvent vers nous qu’ils se tournent quand ils ont des questions. Et nous devons les informer, les accompagner, les aider. Au niveau du timing, ce n’est pas l’idéal. Mettre en place ce SPPE en 2025 alors qu’il y a des élections municipales en 2026 et que l’on sait qu’il y aura notamment dans les petites communes des changements d’équipe… je suis assez sceptique j’avoue, même si sur le fond nous sommes évidemment pour ce SPPE. ».  Elle regrette la faible présence des maires et Interco au sein des CDSF qui vont pourtant prendre une place majeure dans le nouveau dispositif. « Au sein de notre CDSF, nous souhaitons être très pragmatiques et montrer aux maires que l’on peut les aider y compris financièrement à condition qu’ils soient là… Dans mon département par exemple, nous aidons les communes qui souhaitent ouvrir une Mam sur leur territoire en finançant jusqu’à 50% des travaux de rénovation ou de réhabilitation des locaux où elles seront installées », explique-t-elle.

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Catherine Lelièvre

PUBLIÉ LE 07 novembre 2024

MIS À JOUR LE 16 novembre 2024

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