Abonnés
Nicolas Grivel, directeur général de la Cnaf : « Nous serons au rendez-vous du Service Public de la petite Enfance ».
La mise en place du Service Public de la Petite Enfance (SPPE) au 1 janvier 2025 mobilise tous les acteurs de la petite enfance. La Cnaf va jouer sa partition pour accompagner les communes dans leur nouveau rôle d’autorités organisatrices. Le point avec Nicolas Grivel, son directeur général sur les moyens humains et financiers qui seront accordés au déploiement du SPPE.
Les pros de la petite enfance : La COG 2023-2027 a été signée il y a un an. Concrètement, où en est-on de la mise en œuvre en cette rentrée 2024 ?
Nicolas Grivel : La Cnaf a avancé sur l’ensemble des nombreux projets inclus dans la Cog. Sur la petite enfance, elle porte de fortes ambitions pour créer des places et faire évoluer nos modalités d’accompagnement. L’année qui s’est écoulée a donc été jalonnée de décisions du Conseil d’administration pour les déployer concrètement dans des circulaires, qui après consultation des partenaires lors de nos comités partenariaux, permettent aux Caf de les mettre en œuvre sur le terrain. Pour rappel, les décisions majeures : la revalorisation de la Prestation de service unique (PSU) de 3,5% en 2024, après une revalorisation de 6,71% en 2023 et de 5% en 2022 ; sa linéarisation qui permettra aux gestionnaires de ne plus subir les effets de seuil des taux de facturation à compter du 1er janvier 2025 ; l’évolution de nos aides au fonctionnement pour renforcer la qualité de l’accueil avec le financement de trois journées pédagogiques par an et le rééquilibrage de nos aides vers des financements plus forfaitaires ; de nouvelles modalités de soutien pour la création de maisons d’assistants maternels et de micro-crèches, et un effort accru par ailleurs sur la transition écologique et les rénovations de structures existantes ; des financements majorés pour accompagner les hausses de salaires qui doivent progressivement se mettre en place afin d’augmenter l’attractivité du secteur.
Bref, ce fut une année d’action bien remplie. Notre enjeu maintenant est que chacun s’approprie ces réformes. Pour cela, nous devons les faire connaitre. C’est le sens du communiqué (Une année de soutien renforcé aux familles depuis la signature de la COG 2023-2027) que nous avons publié au début de l’été et d’actions que nous lancerons à la rentrée.
2025, c’est l’année du SPPE. L’article 17 de la Loi sur le Plein Emploi votée fin 2023 a précisé les contours de sa gouvernance. Comment la Cnaf va-t-elle accompagner les communes dans sa mise en œuvre ? Avec quels moyens humains et financiers ?
En tant que premiers financeurs des modes d’accueil en lien avec les collectivités, nous nous inscrivons bien sûr dans une logique d’appui au déploiement du Service public de la petite enfance aux côtés du bloc communal et des départements.
Notre soutien comprend deux dimensions.
Il y a le volet financier, le plus connu. Je souligne que cette COG prévoit d’ici 2027 près d’1,5 milliard d’euros de plus pour permettre à chaque jeune enfant de bénéficier d’une solution d’accueil de qualité. Nous faisons donc progressivement plus sur ce plan-là à l’occasion de la mise en oeuvre du SPPE.
Mais nous souhaitons aussi renforcer notre accompagnement technique auprès des collectivités et des gestionnaires de structure. Les Caf ne partent pas de zéro ; elles ont déjà une expertise et un savoir-faire en matière de soutien en conseil et ingénierie des collectivités. C’est le résultat d’une politique de soutien au secteur de la petite enfance qui est prioritaire depuis plusieurs Cog. L’idée est de monter cet accompagnement d’un cran à l’occasion du Service public de la petite enfance. En effet, les communes, autorités organisatrices du secteur, sont à la recherche de davantage d’accompagnement dans la réalisation de nouveaux projets mais également dans la pérennisation de l’offre existante, parfois fragilisée. C’est pourquoi nous avons augmenté nos capacités en la matière avec la mise en place d’une Mission SPPE depuis plusieurs mois. Répartie sur 6 Caf sur tout le territoire, elle est composée de 40 experts recrutés dans la France entière pour proposer aux Caf des ressources mutualisées qui renforcent leurs compétences existantes (tutorat de nouveaux contrôleurs, soutien à la création de projet d’accueil…) et leur donner les moyens d’atteindre leurs objectifs pour être au rendez-vous du SPPE. Je ferai d’ailleurs, pour m’en assurer, une tournée à travers la France d’ici la fin de l’année.
Ces objectifs ne sont pas que quantitatifs, ils concernent aussi la qualité d’accueil qui va de pair avec sa mise en place. Comme je l’indiquais, cela concerne nos aides financières mais aussi nos liens avec les PMI.
Vous soulignez l’importance de l’accompagnement à la qualité, mais vous êtes toujours en attente de critères objectifs pour évaluer cette qualité et décider des EAJE qui méritent un soutien supplémentaire eu égards à leurs efforts…
C’est vrai, mais cela fait longtemps que les Caf encouragent des actions qui ont montré leur intérêt sur le plan qualitatif notamment via le fonds publics et territoires. Je pense notamment à tout ce qui est en lien avec l’innovation ou la transition écologique. Nous avons également intégré les opérations d’amélioration des conditions de travail des professionnels dans notre fonds de modernisation des Eaje, car nous savons que cela engage directement la qualité d’accueil des enfants. Néanmoins, il est vrai que nous sommes dans l’attente du guide-référentiel qualité préparé par la mission IGAS, qui sera pour nous un bon outil d’évaluation.
Les revalorisations salariales influent aussi sur la qualité d’accueil. En cette rentrée, où en est-on du soutien financier de la Cnaf, prévu dans la COG ?
Deux comités de pilotage ont eu lieu au cours desquels les administrations concernées ont examiné les demandes des différentes branches. A l’issue de ceux-ci, les conventions collectives de trois branches (Alisfa, la BASS et la Mutualité Française) ont été déclarées éligibles dès 2024. Dans le secteur public, de nombreuses collectivités -comme Paris par exemple- pourront bénéficier de notre soutien financier, avec souvent des effets rétroactifs.
La loi sur le plein emploi, avec son article 18, vous donne un rôle spécifique en collaboration avec les Pmi et les départements, sur le contrôle des EAJE. Comment l’envisagez-vous dans l’attente d’un décret le précisant ?
En ce qui concerne les contrôles, nous étions déjà actifs, mais il est vrai que la loi renforce notre rôle et nous offre de nouveaux leviers d’action sur des champs ou nous n’étions pas présents. Par exemple les Caf ont désormais la possibilité de contrôler les micro-crèches Paje et les grands groupes de crèches. Deux ou trois Caf ont déjà initié des premiers contrôles de micro-crèches. Et nous travaillons au niveau national en lien avec l’Igas sur les contrôles de groupes, qui ont démarré. Ces nouvelles capacités de contrôle sont une des composantes du SPPE.
Dans le cadre des expérimentations prévues par la loi, la PMI de Haute-Savoie a délégué sa compétence-agrément des EAJE à la Caf. Il semble que bien que jugée assez positive, l’expérimentation s’arrête faute de moyens…
Cette expérimentation avait été décidée par la Caf de Haute Savoie et réalisée sur ses propres moyens. Elle ne figurait pas dans nos conventions d’objectifs et de gestion. J’ai comme vous constaté l’intérêt qu’elle a généré, et il faudra l’évaluer pour en tirer des leçons et peut être des perspectives. Il est évident cependant que le sujet des délégations n’est pas mûr au niveau national. En revanche, avec la loi sur le plein emploi, il y aura nécessairement une collaboration plus étroite avec les PMI et les préfectures tant sur les sujets d’autorisation de fonctionnement que de contrôle pour renforcer la qualité d’accueil. C’est l’enjeu que nous devons poursuivre et il est à portée de main.
PUBLIÉ LE 29 août 2024
MIS À JOUR LE 30 septembre 2024