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Table ronde 1. Gouvernance du SPPE : les communes, autorités organisatrices, sont-elles prêtes ? Quelle place pour les Intercommunalités ?
Dans un peu plus de trois mois, au 1er janvier 2025 exactement, les communes deviendront les autorités organisatrices du Service public de la petite enfance (SPPE), elles qui n’avaient pour l’heure pas de compétence obligatoire en matière d’accueil du jeune enfant. Trois mois… autant dire maintenant… Or, de nombreux points restent encore en suspens et notamment celui de la compensation financière, laquelle n’a pas encore été précisée. Et plusieurs décrets sont également en attente.
Quelles obligations incomberont aux communes au 1er janvier 2025 ? Où en sont-elles de leur projet de déploiement du SPPE ? Comment les Caf peuvent-elles les aider ? Quelles sont les inquiétudes des communes et des intercommunalités ?
Pour échanger sur toutes ces questions, 8 invités : Tasnime Akbaraly, adjointe au maire déléguée à la petite enfance et à la place de l’enfant dans la ville de Montpellier ; Elisa Bazin, cheffe du projet SPPE ; Fatma Drissi, directrice de la Caf des Deux-Sèvres ; Olivier Girardin, maire de La Chapelle-Saint-Luc ; Fannie Le Boulanger, adjointe au maire de Bordeaux chargée de la petite enfance et de la parentalité ; Xavier Madelaine, maire d’Amfreville, co-président du groupe petite enfance de l’AMF ; Alice Rongier, adjointe petite enfance de Saint-Denis et Anne Terlez, vice-présidente de l’agglo Seine Eure, vice-présidente cohésion sociale d’Intercommunalités de France.
SPPE : de nouvelles obligations pour les communes
Elisa Bazin a ouvert le bal de cette table ronde en rappelant le cadre de la loi sur le plein emploi concernant la gouvernance du SPPE et notamment les 4 compétences obligatoires que devront exercer les communes et certaines intercommunalités. Deux concernent l’ensemble des communes, quel que soit le nombre d’habitants : le recensement (qualitatif et quantitatif) des besoins des familles et des enfants sur leur territoire, mais aussi de l’offre existante et disponible ; l’information et l’accompagnement des parents et des futurs parents. Deux autres ne s’appliquent qu’aux communes de plus de 3500 habitants : la planification du développement de l’offre d’accueil et le soutien à la qualité. Et dans le cadre de ces nouvelles compétences, les communes de plus de 10 000 habitants devront mettre en place un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l’offre d’accueil et installer un RPE lorsqu’elles n’en disposent pas encore.
Afin de clarifier certains points, une FAQ relative à la mise en œuvre du SPPE par les autorités organisatrices, réalisée notamment en collaboration avec les associations de collectivités a été publiée en juillet dernier. « Nous n’avons pas voulu passer par un décret pour décliner ces compétences car les communes sont extrêmement diverses, qu’elles ont chacune une vision de la politique en faveur de leurs enfants et de leurs familles. Cette idée de la FAQ était de leur donner des idées, des moyens, des pistes d’action, des conseils, mais ensuite, c’est à elles de s’emparer de ces compétences, de mettre en place la politique pour leurs enfants qu’elles souhaitent », a commenté Elisa Bazin. Avant de mentionner quelques-uns des textes à venir : sur le contenu du schéma de développement et de maintien de l’offre d’accueil ou encore sur le contrôle (article 18 de la loi sur le plein emploi).
Où en sont-ils dans la mise en place du SPPE ?
Montpellier a pris les devants !
La ville de Montpellier n’attend pas le 1er janvier 2025 pour se mettre à l’heure du SPPE. Elle a en effet été proactive sur le sujet. « Ce SPPE offre l’opportunité pour chaque adjoint, avec cette belle délégation de la petite enfance, d’être enfin l’adjoint petite enfance, de toutes les familles. (…) », a en premier lieu souligné Tasnime Akbaraly. Avant d’expliquer : « A Montpellier, on a souhaité être préfigurateur de ce SPPE car c’était l’ambition politique de se dire comment on fait pour changer de braquet sur ce rôle d’adjoint petite enfance. » Concrètement, la construction de ce service public a été envisagée avec deux volets. Le premier : « un guichet universel d’information d’accompagnement des parents ; on se sert donc de nos Rpe (appelés espaces petite enfance), dans lesquels en sus des missions classiques, on va ajouter un rôle de levier de prévention pour pouvoir accompagner les parents sur les 1000 jours, qu’ils aient besoin d’un accueil ou pas. Et sur ce guichet universel on va leur expliquer toute l’offre ».
« Le second volet, a poursuivi Tasnime Akbaraly, nous l’avons appelé Montpellier petite enfance au service du public, c’est notre SPPE un peu local dans lequel nous avons créé une instance de concertation locale dans laquelle se réunissent des acteurs, des partenaires institutionnels qui nous semblent partager les mêmes valeurs (de laïcité, qualité, inclusion, mixité sociale), entre autres donc les acteurs petite enfance non lucratifs. (…) Et dans ce service public petite enfance montpellierain, nous allons proposer un soutien financier qui va aller jusqu’au doublement des subventions des acteurs associatifs pour pouvoir leur permettre d’asseoir financièrement leur gestion mais avec en contrepartie leur proposer de participer aux missions du service public, c’est-à-dire partager l’ouverture des crèches dans les QPV, des missions d’inclusion notamment des familles monoparentales donc nous allons aller sur des listes uniques et des critères communs d’attribution des places. »
La Chapelle Saint-Luc plus motivée que jamais
La Chapelle Saint-Luc (un peu plus de 10 000 habitants) est classée au 9e rang des communes les plus pauvres de France. Pour rappel, lors de son tour de France dans le cadre de la concertation territoriale sur le SPPE, Elisabeth Laithier s’était arrêtée à La Chapelle-Saint-Luc et avait salué, entre autres, le projet « L’été de la socialisation » mis en place par le service petite enfance de la ville à destination des enfants qui vont faire leur entrée en maternelle et qui n’ont pas bénéficié d’un mode d’accueil formel. Une commune relativement pauvre peut-être mais qui ne manque pas d’idées, d’envie, et sait actionner tous les leviers, comme nous l’a confié son maire, Olivier Girardin : « La question de la place de l’enfant chez nous est une dimension politique fondamentale. Et à partir de là, on décline avec nos moyens, nos caractéristiques. (…) Nous avons mis en place un gros travail sur les parents car nous avons beaucoup de familles monoparentales, on a un QPV qui fait la moitié de la ville, on a 62% de logements sociaux. (…) On essaie de trouver des solutions. » Et a précisé : « Nous avons mis en place la maison des 1000 jours, nous avons développé des places Avip… Nous essayons de déployer tous les outils pour aider la parentalité et mettre les petits dans les meilleures conditions, mais au départ nous avions un déficit. On se sert du schéma départemental, de la mise en place du SPPE. » Le maire de La Chapelle-Saint-Luc a également affirmé : « Le service public de la petite enfance, ce n’est pas un service de garde, c’est un service de projection d’une société que l’on souhaite organiser au plus près avec un certain nombre de valeurs et de dispositifs. Et tout le monde doit y être associé. »
Bordeaux a bien avancé sur le sujet
A Bordeaux, de nombreuses choses ont déjà été mises en place comme l’a indiqué Fannie Le Boulanger : « La politique petite enfance des communes, ce n’est pas que les crèches et même ce n’est pas que les modes d’accueil, c’est tous les enfants de 0 à 4 ans et leurs familles. En ce qui concerne les Rpe, nous sommes déjà bien couverts (…) Nous avions donné un gros coup d’accélération au niveau des Rpe, en doublant le nombre d’animatrices pour offrir un maillage très fin aux familles (…). Nous avons un guichet unique qui concerne l’ensemble des places que la ville cofinance (les places municipales en gestion directe, les places municipales en gestion déléguée, les places associatives, les réservations de berceaux de marchés publics) avec des critères d’attribution commun. »
Amfreville œuvre depuis longtemps pour les familles
Amfreville compte 1400 habitants. De fait, cette commune, qui n’a pas transféré toute sa compétence petite enfance à l’Interco, fait partie des autorités organisatrices auxquelles la loi confère le moins d’obligations. Intégrer un service public de la petite enfance, « ce n’est pas un grand bouleversement car c’est un choix politique que nous avons depuis plusieurs années. Nous avons mis en place des politiques publiques en faveur des familles. (…) le service public de la petite enfance, c’est une globalité », a indiqué son maire Xavier Madelaine. Et a poursuivi : « (…). Le service public de la petite enfance, c’est aussi une volonté politique et donc ça avance ou ça n’avance pas. Au niveau de l’intercommunalité à laquelle j’appartiens, nous avions une majorité d’élus qui étaient très poussifs pour mettre en place les services aux familles. Et donc nous avons demandé, pour les collectivités qui souhaitaient impulser une dynamique, de reprendre certaines compétences. C’est la raison pour laquelle la compétence a été un peu partagée. L’accueil individuel à l’interco et l’accueil collectif aux communes. Nous venons de délibérer pour pouvoir être signataire de la convention territoriale globale et nous nous sommes inscrits pour l’accueil d’une structure d’accueil collectif sur la commune (mode de gestion psu). »
Saint-Denis et Pierreffite-sur-Seine : un seul SPPE
En janvier 2025, Saint-Denis et Pierreffite-sur-Seine seront une seule et même commune. Les deux villes doivent donc travailler ensemble sur la mise en place du SPPE. Alice Rongier, adjointe au maire petite enfance de Saint-Denis, a expliqué qu’ils avaient procédé en 4 temps : « Pour travailler à cette transformation, la première étape a été de faire un diagnostic complet entre les deux villes. Un exercice très intéressant car cela nous a permis de définir les atouts, les forces, d’avoir une cartographie de tous les lieux d’accueil de jeunes enfants dans les deux villes, de connaître les projets, les organisations, les services et de découvrir les actions menées par le tissu associatif autour de la petite enfance. » Et de fait, si les deux villes ont des points communs, elles ont aussi des différences. « L’avantage de ces deux villes c’est qu’elles portent la même politique de la petite enfance car la petite enfance est inscrite dans les deux villes dans le projet éducatif global. On a remarqué aussi qu’il y avait des différences significatives en matière de gestion dans les deux services (ex : à Pierrefitte, les Laep sont gérés par le service municipal de la ville alors qu’à Saint-Denis, ils sont plutôt gérés par chaque centre social qui sont dans les différents quartiers de la ville. Cette différence nous a permis de réfléchir sur comment, dès janvier 2025, on pourrait mieux développer ces lieux d’accueil enfant-parent, qui va les gérer afin que ces lieux ne soient pas identifiés comme un lieu d’accueil dans un quartier mais plutôt accessible à tous les habitants de la ville », a partagé Alice Rongier.
La 2e étape : « Nous avons travaillé sur une commission commune d’attribution des places en crèche. L’enjeu est important car nous souhaitons aussi attirer les familles les plus éloignées des modes d’accueil », a indiqué Alice Rongier.
La 3e étape : « Nous avons réfléchi à des critères communs d’attribution des places en crèche en tenant compte de la situation familiale, professionnelle des familles, et de la situation sociale des familles pour apporter de la transparence, de l’équité et pour permettre à tous les habitants de la ville de s’inscrire pour avoir une place en crèche », a-t-elle souligné.
4e étape : « Nous avons travaillé sur la formation des agents, a continué Alice Rongier. Avant ce nouveau SPPE, nous avons proposé une formation commune autour des neurosciences et de la gestion des émotions pour les agents de Pierrefitte mais aussi ceux de Saint-Denis. On va la financer également aux assistantes maternelles car notre enjeu est de garantir la qualité d’accueil que ça soit un accueil collectif ou individuel. »
Et a conclu : « La constitution de cette commune nouvelle a été un avantage car elle nous a permis de tout mettre à plat, de réfléchir sur ce qui est bien, sur ce qui n’est pas bien. Elle va nous permettre aussi de renforcer nos équipes, car on va mutualiser nos équipes, on va changer le mode d’organisation. A partir de janvier 2025, la ville de Saint-Denis sera la plus grande ville après la ville de Paris, sa dimension d’échelle et sa dimension de taille vont augmenter nos capacités en matière d’ingénierie dans la production de projets, va nous permettre de recruter du personnel, et de rester compétitif en termes de recrutement de professionnels auprès d’enfants et de pérenniser les équipes. »
Le rôle majeur des Caf dans la mise en place du SPPE
La Cnaf et les Caf ont un rôle clé auprès des collectivités, futures autorités organisatrices, dans l’installation du Service public de la petite enfance. En termes financier bien sûr mais aussi d’ingénierie. L’exemple de la Caf des Deux-Sèvres (département rural de 374000 habitants, 16 communes de plus de 3500 habitants et 4 communes de plus de 10 000 habitants) avec Fatma Drissi, sa directrice : « Pas de bouleversement pour nous avec ce service public de la petite enfance. En revanche, une volonté des uns et des autres d’intensifier et d’accélérer les choses. Cela s’est traduit pour nous par le souhait de faire en sorte que l’ensemble de l’arsenal du dispositif à la fois financier et d’accompagnement soit très vite connu des collectivités et des intercommunalités pour que derrière l’accompagnement démarre, la réflexion démarre, les débats aussi dans chacun des conseils et que la machine puisse se mettre en route. Et c’est aussi à nous, via nos personnels qui accompagnent les élus locaux, le bloc communal, les intercommunalités, de faire en sorte d’être visible, d’être plus présent et de déployer cette ingénierie d’accompagnement, de soutenir les nouveaux projets que ce soit les projets innovants que ce soit les projets autour de l’attractivité des métiers et aussi le développement de nouvelles structures d’accueil collectif. »
Pour précision, dans les Deux-Sèvres, 6 intercommunalités ont la compétence petite enfance, et 2 ne l’ont pas. « Cela veut dire, explicite Fatma Drissi, que nous travaillons à des échelles différentes avec ces acteurs. Et puis le département est notre partenaire majeur sur le sujet mais aussi les services de la préfecture dans le cadre du Comité départemental des services aux familles qui nous a semblé être l’espace fondamental essentiel de débat, de travail sur un plan d’action. (…) ». Un plan d’action qui « a plusieurs axes. Soutenir les politiques territoriales petite enfance. Concrètement, cela veut dire que chaque élu, quelle que soit la taille de la commune, connaît son référent au sein de la Caf et son référent auprès du Conseil départemental. Et que ce référent puisse être activé dès lors qu’il y a une idée, un projet. C’est aussi mettre à disposition toutes les données utiles au recensement des besoins. (…) En fait, nous faisons en sorte de pouvoir avoir, à la fois au plan départemental et à la fois au plan de chaque EPCI, un plan d’action qui nous permette de cheminer vers le SPPE sur chacun des territoires. »
L’implication des Caf saluée
Les intervenants à la table ronde n’ont pas manqué de reconnaître le travail et l’action de leur Caf. « Nous avons une Caf du Calvados très dynamique. (…) Oui il y a des caf qui fonctionnent très très bien, a ainsi souligné Xavier Madelaine. Pour Olivier Girardin : « C’est agréable d’avoir un partenaire à la fois exigeant et bienveillant. » « J’en profite aussi pour remercier la Caf de la gironde qui nous suit énormément sur tous nos projets innovants. On a besoin des Caf », a pour sa part tenu à dire Fannie Le Boulanger.
Des communes et intercommunalités engagées mais inquiètes ou en demande de clarifications
Les Intercommunalités insécurisées
« A Intercommunalités de France, nous avons et aurons toujours la conviction que cette question de la petite enfance méritait mieux qu’un véhicule législatif plein emploi (…) », a commencé Anne Terlez. Et a poursuivi : « 900 intercommunalités sont compétentes en la matière, c’est-à-dire que les ¾ des interco exercent toute ou partie de la compétence et sur tout ou partie de leur territoire. (…) Et sur 900 intercommunalités compétentes, on a à peu près 27000 maires qui ont délégué leurs compétences. La FAQ, certes a clarifié le périmètre des 4 compétences du service public de la petite enfance, parle un peu de ces transferts mais néanmoins elle n’est pas opposable et ne le sera jamais. (…) » Bref, très clairement les Interco auraient préféré que ça soit dans la loi. Et Elisa Bazin de répondre : « Non, ce n’était pas possible. Dans la rédaction de la loi, notre première intention était d’inclure les intercommunalités, la Dgcl avait une vision plutôt opposée pour des raisons techniques. » Ce à quoi a rétorqué Anne Terlez : « (…) Sur l’avis de la Dgcl de ne pas pouvoir inscrire « ou leurs groupements », je pense que c’était motivé par des questions politiques et non techniques. »
« Donc nous nous sentons en insécurité juridiquement sur la question de l’exercice de la compétence, du contrôle, de la compensation financière », a continué Anne Terlez. Avant d’ajouter : « Dans mon intercommunalité, nous exerçons déjà cette compétence dans ses 4 dimensions. Nous allons donc poursuivre, mais il faut comprendre que dans la plupart des interco, on n’a pas encore commencé à discuter faute de connaître les termes de l’équation (budgétaire, législative). C’est très compliqué d’aborder ce sujet et de débattre en exprimant un avis éclairé. Nous avons à cœur de bien faire, nous avons ce Service public de la petite enfance chevillé au corps. On ira, mais avec des incertitudes qui font que le débat est compliqué. »
Puis Anne Terlez a pointé du doigt le fait qu’il est écrit dans la FAQ qu’il n’y aura pas de compensation financière directe aux intercommunalités. « C’est évidemment un point bloquant et très compliqué. (…) Il faut régler cette question-là et régler en particulier la question des interco compétentes qui n’ont pas de communes de plus de 3500 habitants parce qu’il y en a », a-t-elle demandé.
Quid du schéma pluriannuel ?
Plusieurs points inquiètent Fannie Le Boulanger et notamment celui du schéma pluriannuel : « A Bordeaux, nous sommes préoccupés par ce schéma pluriannuel. Que va-t-on y mettre ? Quelle association des familles ? Quelles modalités d’élaboration ? ». Et de préciser : « La loi évoque le mot concertation. C’est un document de planification qui a vocation justement à être public, approprié par les citoyens, en ce sens-là, je trouve que c’est une vraie avancée démocratique. (…) On sait que tous ces gros documents de planification demandent des mois de préparation. Nous, nous avons envie d’avancer, de prévoir, mais nous aurions vraiment besoin d’un minimum d’infos et plutôt par le biais de circulaires ou de décrets, quelque chose d’opposable (…) ». Sur ce sujet, Elisa Bazin s’est voulue rassurante : « Un décret d’application va sortir, il est cours de préparation. On va continuer les concertations et à vous associer pour vérifier que ça correspond bien à vos attentes et à vos besoins (…) ».
Inquiétude autour de l’avis préalable du conseil municipal sur l’ouverture d’une structure
La loi sur le plein emploi prévoit que « les communes de plus de 3500 habitants doivent rendre un avis préalable à l’implantation d’une structure de droit privé sur leur territoire. Si les conseils municipaux s’opposent à l’installation d’une structure de droit privé sur leur territoire car ils considèrent qu’elle ne correspond pas aux besoins de leurs familles, l’implantation n’est pas possible », a indiqué Elisa Bazin. Et Olivier Girardin de réagir : « C’est une responsabilité énorme (…) puisqu’on a le choix entre la quantité et la qualité. (…) Et je ne parle même pas des conditions dans lesquelles nous allons pouvoir nous faire un avis. C’est-à-dire des moyens humains nécessaires à l’établissement d’un référentiel qui nous permettra de dire : ça c’est un bon projet, ça ce n’est pas un bon projet ». (…) S’ajoute à ce chef de filât des éléments de contrôle sanitaire et social dont je ne sais pas comment nous allons les mettre en place ».
Ce à quoi a répondu Elisa Bazin : « On ne transfère pas aux communes les compétences d’autorisation et de contrôle qui restent vraiment au niveau du conseil départemental. Vous aurez à donner un avis sur la pertinence de l’implantation d’une structure selon le projet pédagogique, selon le mode de tarification des familles et selon les besoins en termes de développement d’accueil ».
Mais le débat n’est pas clos sur cet avis préalable. « Un avis doit nécessairement être motivé (…), a fait remarquer Fannie Le Boulanger. On suppose qu’un avis négatif sera bien souvent attaqué par les groupes qui désirent s’installer donc faudra avoir des motifs solides et sur quelle base ? Car nous serons tout en amont du projet d’établissement, et nous avons peur d’avoir des documents très génériques qui présentent un groupe de crèche et pas de documents précis sur lesquels se fier pour fonder notre avis. Et est-ce que certaines communes parce qu’elles en ont la conviction politique pourront tout simplement dire : moi je m’y oppose car c’est du privé lucratif. (…) Est-ce que ce sera un motif légal ? » a-t-elle questionné.
La réponse d’Elisa Bazin : « L’avis doit être rendu avec le recensement qualitatif et quantitatif des besoins de vos familles (…). Vous ne pourrez pas rendre un avis négatif sur le fait que vous ne voulez pas tel type de structure. Par contre, vous pourrez dire : ce modèle de structure ne correspond pas aux besoins de mes familles parce que le modèle de tarification est trop élevé par exemple… ».
Une autre préoccupation de Fannie Le Boulanger : le fait que ce soit les conseils municipaux qui devront rendre l’avis. « A Bordeaux, nous sommes très inquiets (il n’y a pas de conseil municipal entre juillet et octobre) car nous sommes dans l’impossibilité de le faire. Il faudra intervenir rapidement car nous n’allons pas pouvoir rendre des avis dans les temps en conseil municipal et je pense que tous les conseils municipaux qui devront rendre des avis vont être aussi engorgés par ce sujet », a-t-elle prévenu.
Bonus attractivité : une injustice pour certains
Pour sa part, Tasnime Akbaraly a regretté : « Les villes préfiguratrices qui ont voté en 2022 des revalorisations considérables pour leurs professionnels (…) qui ont été en avance donc sur ces revalorisations n’en bénéficient pas. (…) » A bon entendeur…
Enfin, en quelques mots Oliver Girardin a résumé l’ensemble des craintes des autorités organisatrices : « Nous sommes en train de construire quelque chose de très original en France dans une période d’incertitude à la fois financière, réglementaire et politique. On est censés organiser quelque chose avec une volonté politique manifeste dans un cadre totalement insécurisant, ce qui ne veut pas dire que nous n’allons pas le faire car nous le faisons déjà. »
Caroline Feufeu
PUBLIÉ LE 20 septembre 2024
MIS À JOUR LE 03 octobre 2024